Il n’est pas impossible que pour certains d’entre vous, la prédication que vous allez entendre cet après-midi constitue la chose la plus importante que vous ayez jamais entendue, et que vous entendrez jamais. On va parler d’un truc dont les chrétiens parlent beaucoup : l’évangile. Mais c’est quoi, exactement, l’évangile ? Vous savez peut-être déjà que le mot « évangile », étymologiquement, veut dire « bonne nouvelle » en grec. Quand l’apôtre Paul dit, par exemple, qu’il n’a pas honte de l’évangile, car c’est une puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit, ça a l’air intéressant, non ? Ça a l’air important, même ! Mais qu’est-ce qu’il veut dire par « l’évangile » ? Quelle est cette bonne nouvelle qui semble si importante à connaître ? Eh bien c’est précisément à cette question que l’apôtre Paul répond dans le texte qu’on est sur le point de lire. Dans ce passage, Paul veut répondre à des gens qui ont dénaturé l’évangile ; c’est-à-dire des gens qui parlent de « l’évangile », mais qui en ont changé le sens, volontairement ou involontairement. Imaginez un pasteur qui prétendrait annoncer « l’évangile », mais qui en réalité annoncerait autre chose que la véritable « bonne nouvelle » qui normalement fait l’objet de la foi chrétienne et de la prédication chrétienne. Et l’apôtre Paul va nous faire comprendre ici que ce n’est pas n’importe quoi que l’on peut faire passer pour « l’évangile ». Le souci de Paul, ici, c’est donc principalement un souci intellectuel : c’est-à-dire qu’il veut qu’on comprenne intellectuellement ce que c’est que l’évangile authentique. Mais cette compréhension intellectuelle a d’énormes répercussions dans notre vie. Et pourquoi on en parle aujourd’hui ? Parce qu’en ce dimanche de Pâques, nous commémorons la résurrection de Jésus ; et parce que justement, d’après l’apôtre Paul, la résurrection de Jésus est un élément central, essentiel même, de la « bonne nouvelle » qui fait l’objet de la foi et de la prédication chrétiennes. Dans le raisonnement de Paul, ici, vous allez voir qu’il y a deux points. Un : le fait de maintenir l’authenticité de l’évangile est une question de vie ou de mort. Deux : la résurrection corporelle de Jésus est un élément essentiel de l’évangile. Donc, conclusion : croire à la résurrection de Jésus est une question de vie ou de mort.
La première chose, donc, que l’apôtre Paul veut nous faire comprendre, c’est qu’il est extrêmement important de savoir quel est le véritable évangile chrétien, c’est-à-dire quelle est exactement la « bonne nouvelle » qui fonde notre foi et notre espérance. Il va nous le préciser dans les versets qui suivent, mais d’abord (v. 1-2), on voit que Paul insiste vraiment sur l’importance de retenir l’évangile dans les bons termes, sans quoi les conséquences seraient dramatiques. Pour Paul, c’est simple : notre salut en dépend !
Alors il faut bien comprendre que l’évangile, c’est la « bonne nouvelle » de quelque chose qui s’est passé dans l’espace et dans le temps. Annoncer l’évangile, c’est faire connaître cette bonne nouvelle ; et croire l’évangile, c’est recevoir cette bonne nouvelle, et en tirer les conséquences logiques pour sa vie. Mais si on dénature cette nouvelle, ou si on la remplace par une autre, ou si on l’oublie, ça ne change rien à la réalité de ce qui s’est passé dans l’espace et dans le temps, mais par contre, cette réalité devient inefficace dans notre vie, puisqu’on ne va pas en tirer les bonnes conséquences. Si je vous disais : « Bonne nouvelle ! Liliane Bettencourt est dehors sur le trottoir et elle est en train de distribuer toute sa fortune aux gens qui passent ! » Si vous croyez la bonne nouvelle, vous allez en tirer les conséquences logiques et vous précipiter dehors pour recevoir un petit peu de cette fortune. Mais si vous n’écoutiez pas quand j’ai annoncé la bonne nouvelle, ou si vous souffrez d’amnésie à court terme, ou si n’avez pas bien entendu et ce que vous avez compris c’est que votre tata « Liliane est en cours » de traitement contre son cancer et qu’elle apprécierait votre passage à l’hôpital, vous n’allez pas en tirer les mêmes conséquences.
Il y a quelque temps, j’ai reçu une lettre de la part d’une banque qui m’informait que j’étais titulaire d’un compte sur lequel je n’avais pas fait d’opération depuis 1994. J’avais complètement oublié l’existence de ce compte, que mes parents avaient ouvert pour moi quand j’étais enfant. Le solde de ce compte : 8,13 EUR. Mais je me suis dit : en oubliant l’existence de ce compte, je n’ai pas fait disparaître la réalité de son existence, mais j’ai vécu tout ce temps comme étant plus pauvre que je ne l’étais en réalité. Et avec l’évangile, c’est un peu la même chose, mais multiplié par l’infini. Il y a une réalité : c’est que Dieu a fait quelque chose, dans l’espace et dans le temps, pour sauver les hommes. C’est une bonne nouvelle ! Mais si on oublie ce qu’elle est, ou si on la remplace par autre chose, ou si on la dénature, certes la réalité historique ne change pas, mais on empêche cette réalité de produire dans notre vie ce qu’elle est censée y produire, c’est-à-dire notre salut !
Et c’est pour cette raison que Paul insiste tellement sur l’importance de « retenir » l’évangile « dans les bons termes », en disant que notre salut en dépend. Et c’est aussi pour cette raison que nous ne devons pas reculer devant les intimidations de ce monde relativiste et pluraliste qui nous accuse d’intégrisme lorsqu’en tant que chrétiens, nous défendons l’authenticité de l’évangile, en disant par exemple : « Non, on ne peut pas croire tout et son contraire sous prétexte de tolérance ; oui, c’est grave si on remet en question tel ou tel point essentiel de la foi chrétienne ; non, la bonne nouvelle annoncée par Jésus et les apôtres n’est pas un concept fluide qu’il faut mettre au goût du jour ; oui, il y a une vérité objective et le salut des gens en dépend ! »
Il est donc important de retenir l’évangile dans les bons termes. Mais quels sont-ils, ces termes, alors ? Quel est le véritable évangile chrétien ? Quelle est exactement la « bonne nouvelle » qui fonde notre foi et notre espérance ? Eh bien c’est ce que l’apôtre Paul nous précise ensuite (v. 3-7). C’est une bonne nouvelle qui tient, ici, à deux éléments essentiels que Paul met en avant, en leur appliquant cette même expression : « selon les Écritures », pour montrer que ces éléments sont conformes à tout le reste de la révélation de Dieu, et donc à son plan conçu depuis toujours. Ce sont des éléments qui accomplissent le plan éternel de Dieu pour le salut des hommes. Premièrement : « Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures ». Deuxièmement : « Il est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures » (v. 3-4).
Paul rappelle donc que le Christ (le messie) est venu pour nous sauver de nos péchés (c’est-à-dire de ce qui nous séparait de Dieu), et il a fait cela en mourant. Il a donné sa vie comme rançon de notre délivrance. Il a accepté de prendre sur lui le châtiment de Dieu, qui nous était destiné en raison de nos péchés. Il s’est substitué à nous, et il a détourné sur lui-même les conséquences de nos péchés. Il a pu faire ça au profit d’un nombre incalculable d’hommes, de femmes et d’enfants, parce que lui, était parfaitement juste, pur et saint, et en plus, il avait la nature divine unie à sa nature humaine, ce qui veut dire qu’il était capable de régler une dette infinie, proportionnelle à la justice infinie de Dieu. C’est ça que Paul veut dire, quand il dit que « Christ est mort pour nos péchés ».
OK, mais comment en être sûr ? Tout le monde sait que Jésus est mort. Mais comment savoir pour sûr que sa mort produit l’expiation de mes péchés ? Ça sonne bien en théorie, mais n’importe qui peut prétendre une chose semblable. Peut-être que c’est la mort d’Elvis Presley ou de Nelson Mandela, qui produit l’expiation de mes péchés ! Eh bien voici comment on peut le savoir. Voici ce qui valide de manière suprême et incontestable tout ce que Jésus a prétendu avant sa mort : « Le troisième jour, il est ressuscité ». C’est vrai que n’importe qui peut prétendre venir de la part de Dieu, être même Dieu incarné, être le messie tant attendu, accomplir les prophéties de l’Ancien Testament, être sans péché, et offrir sa vie comme sacrifice pour le pardon des péchés des autres ; et une fois que le gars est mort, peut-être que ce qu’il a dit est vrai. Mais si le troisième jour il revient d’entre les morts, alors là il vous présente un argument… implacable !
C’est la raison pour laquelle Paul insiste tellement ici sur toutes les personnes qui ont vu Jésus après sa résurrection (v. 5-7). La plupart de ces gens sont vivants au moment où Paul écrit, et sont donc en mesure de confirmer ou de réfuter ce que dit Paul. Paul ajoute même son propre témoignage, le témoignage de sa conversion et du changement radical de sa vie, pour appuyer l’authenticité de la résurrection de Jésus (v. 8-10). Quel événement a bien pu produire un tel changement chez Paul, et une telle consécration à l’œuvre de Dieu, sinon la rencontre avec le Christ ressuscité ? Pour Paul, donc, la résurrection de Jésus est un élément indispensable du véritable évangile, d’abord parce qu’elle certifie l’efficacité expiatoire de la mort de Jésus. Mais pas que !
La résurrection corporelle de Jésus c’est aussi le triomphe de notre Sauveur ; et à ce titre, elle inaugure historiquement notre salut. En vertu de la résurrection de Jésus, le salut des croyants n’est pas que pure théorie ; leur salut est « incarné » historiquement. Un peu plus loin dans ce même passage, Paul dit que le Christ ressuscité, c’est les « prémices » des croyants qui meurent, c’est-à-dire que Jésus est le premier ressuscité d’un grand peuple (le peuple des croyants) qui ressuscitera un jour à sa suite (cf. v. 20-23). Et ça, c’est merveilleux, parce qu’on n’avait pas juste besoin d’être acquitté de nos péchés ; on avait aussi besoin d’être délivré des conséquences dans lesquelles nos péchés nous avaient entraînés, c’est-à-dire délivré de la mort.
Imaginez que vous soyez emprisonné dans un cachot quelque part, surveillé par un méchant, et qu’un héros vienne combattre le méchant pour vous. Et imaginez que pour triompher du méchant, le héros sacrifie sa propre vie. Merveilleuse histoire, n’est-ce pas ? Sauf qu’une fois le méchant vaincu, et le héros mort, il n’y a personne pour vous ouvrir la porte du cachot. Votre ennemi qui vous tenait captif est vaincu ! Vous êtes enfin débarrassé de lui… mais pas libre pour autant ! C’est ballot ! De la même façon, à quoi cela servirait-il d’être libéré de ses péchés, si on n’est pas libéré de la mort ? On serait sauvé à moitié, en quelque sorte. On pourrait toujours espérer que notre âme aille vers Dieu après la mort, mais notre corps, lui, retournerait à la poussière sans aucun espoir de délivrance. Or la « bonne nouvelle » que constitue l’évangile, c’est au contraire la « bonne nouvelle » que Dieu a fait tout ce qu’il fallait pour que nous soyons sauvés tout entiers. Ce que Dieu nous présente en Jésus, c’est un salut complet, pour l’homme complet, corps et âme.
Alors on se posait la question en introduction : c’est quoi, exactement cet « évangile » dont parlent tant les chrétiens ? Une « bonne nouvelle », OK, mais quoi, comme bonne nouvelle ? Eh bien c’est la bonne nouvelle de ce que Dieu a fait dans l’espace et dans le temps pour sauver tous ceux qui se confient en lui. Et dans ce passage, cette réalité est résumée à deux informations essentielles : Christ est mort pour nos péchés, et il est ressuscité le troisième jour. Et ces informations sont tellement importantes que notre salut en dépend. De nos jours, on entend parfois dire, même par des gens qui portent le nom de chrétiens, que finalement, ce n’est pas si important de croire que Jésus est réellement ressuscité. Ça ne change pas grand-chose. Ce qui est important, c’est l’enseignement moral de Jésus. Ou ce qui est important, c’est l’exemple de sa vie altruiste. Ou ce qui est important, c’est « l’esprit » de Jésus que nous sommes appelés à porter et à répandre autour de nous. Ou ce qui est important, c’est l’héritage d’amour que Jésus nous a laissé et que nous devons incarner au mieux ; et finalement, c’est comme ça que Jésus est vivant au milieu de nous. Balivernes ! Parce que ce qui est important selon l’apôtre Paul, c’est que le Christ est mort pour nos péchés, et qu’il est ressuscité le troisième jour. En-dehors de ces réalités, on n’a pas l’évangile. On peut annoncer et promouvoir et enseigner tout ce qu’on veut, et même appeler ça « chrétien » et « protestant » et « évangélique », mais on n’a pas la véritable « bonne nouvelle » au sens où l’entendaient Jésus et les apôtres, la seule « bonne nouvelle » qui mérite vraiment d’être entendue et qui concerne ce que Dieu a fait, réellement, dans l’espace et dans le temps, pour nous sauver. Et c’est aussi la raison pour laquelle je disais tout au début qu’aujourd’hui, il n’était pas impossible que pour certains d’entre vous, cette prédication constitue la chose la plus importante que vous ayez jamais entendue, et que vous entendrez jamais. Parce que l’objet de cette prédication, et du texte que nous venons de regarder ensemble, c’est vraiment une question de vie ou de mort. Vous avez entendu l’évangile aujourd’hui ; est-ce que vous allez en tirer les conséquences qui s’imposent logiquement, à savoir, reconnaître que vous ne méritez pas la faveur de Dieu, et placer toute votre confiance en Jésus sur la base de ce qu’il a accompli, par sa mort et sa résurrection, pour vous réconcilier éternellement avec Dieu ? J’ai trouvé ce matin, sur le fil Facebook de notre ami Jonathan Chaintrier, cette citation du théologien allemand Wolfhart Pannenberg qui a dit que « les éléments en faveur de la résurrection de Jésus sont tellement concluants que personne ne la mettrait en doute, si ce n’était pour deux raisons : d’abord, le fait que c’est un événement très inhabituel. Ensuite, le fait que si on y croit, on doit nécessairement changer sa façon de vivre. » Oui, Christ est mort pour nos péchés, et le troisième jour il est ressuscité, et ça change tout ! Recevez cette bonne nouvelle, et qu’elle transforme toute votre vie dorénavant. Comme le dit l’apôtre Paul dans un autre passage : « Si tu confesses de ta bouche le Seigneur Jésus, et si tu crois dans ton cœur que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, tu seras sauvé » (Rm 10.9). Vous voyez : croire à la résurrection de Jésus, c’est bien une question de vie ou de mort !