Vous avez certainement déjà entendu cette expression française : l'habit ne fait pas le moine. L’idée que les apparences peuvent être trompeuses. Et je suis sûr que nous pourrions tous raconter une anecdote de notre vie où l’on s’est fait avoir parce que l’on a jugé sur les apparences. Et vous avez peut-être même parfois joué là-dessus pour votre propre bénéfice.
L’un de mes frères avait réussi au salon de l’automobile de Genève, à rentrer dans presque tous les stands de voitures de luxe, simplement parce qu’il était venu en costard-cravate en parlant anglais avec un accent bien british accompagné d'un ami qui parlait anglais avec un accent russe. Tout était réuni pour qu’on ait l’impression qu’ils étaient fortunés. En réalité, il avait une vingtaine d’années, il était étudiant, mais par l’apparence qu’il s’est donnée il a réussi à rentrer dans des stands fermés et gardés par des vigiles et à se faire ouvrir les portes d’un petit coupé Jaguar pour s’y mettre au volant. Pendant ce temps-là le commun des mortels admirait les véhicules de loin derrière les barrières.
Je pense aussi à l’une de mes tantes qui avait acheté de magnifiques pierres bleu turquoise, mais qui ont bien vite perdu leur couleur lorsque mon oncle les a passées sous l’eau. C’était de vulgaires cailloux qui avait été peints.
Je ne voulais pas vous donner des idées d’arnaques à reproduire, mais souligner que c’est une réalité à laquelle nous faisons face quotidiennement : les apparences sont trompeuses. Méfions-nous des apparences !
Prenez ce monde, il semble tourner tout seul mais il se pourrait bien qu'il y ait un grand architecte qui en soit à l’origine et qui maintienne et soutienne cette création. Nous pouvons aussi facilement avoir l’impression que nous vivons une vie autonome et parfaitement libre et que nous n’aurons jamais à rendre compte à qui que ce soit de nos mauvaises pensées, de nos mauvaises actions, de nos ruses, de nos fraudes. Et pourtant, il se pourrait bien que nous ayons un jour à comparaître devant notre créateur pour rendre des comptes sur notre conduite. Méfions-nous des apparences !
Nous allons lire un passage dans la Bible qui se trouve dans l’évangile de Luc et qui nous décrit un épisode de l’enfance de Jésus, où deux personnages, Siméon et Anne, ont su voir au-delà des apparences, ils ont discerné grâce au Saint Esprit qui était ce petit enfant juif qui venait de naître.
Nous voyons au début de ce passage qu’on ne pouvait pas soupçonner sur l’apparence que ce nouveau-né allait vivre un destin extraordinaire. Il ressemblait à un Juif ordinaire de son temps, même si les circonstances dans lesquelles il est né étaient exceptionnelles.
Les versets qui précèdent nous racontent la venue d’un ange qui annonce à une jeune femme fiancée (Marie) qu’elle allait devenir enceinte sous l’action du Saint Esprit et qu’elle aurait un fils qui monterait sur le trône de David son père et dont le règne serait éternel (Luc 1.31-33). Des bergers sortis de nulle part étaient venus voir l’enfant dans l’étable où il est né (Luc 1.8-20), puis des mages venus d’orient étaient venus l’adorer (Matthieu 2.1-12). Mais d’un point de vue extérieur, cet enfant était un enfant juif ordinaire, et sans une révélation spécifique, on ne pouvait pas soupçonner le destin auquel il était promis.
Marie et Joseph avaient eu des révélations sur le destin hors du commun de leur fils mais ils se sont comportés le plus naturellement du monde envers ce petit enfant. Et ils ont accompli tout simplement ce que la loi leur demandait de faire. Cet enfant était né dans un peuple bien précis : la nation juive. Un peuple que Dieu avait choisi et à qui il avait transmis par Moïse la loi de Dieu, un peuple à part qui devait accueillir et préparer le chemin d’un envoyé de Dieu : le messie.
Nous voyons au début de ce passage Joseph et Marie qui accomplissent fidèlement tous les préceptes et les commandements de la loi juive. Dans les v. 21 à 24, il y a trois règles de la loi de Dieu qui sont parfaitement respectées par eux : la circoncision, la purification et la consécration du premier-né.
- La circoncision : Dieu avait dit à Abraham en Genèse 17.11-12 (voir aussi Lévitique 12.2-3) :
« Vous vous circoncirez ; et ce sera un signe d'alliance entre moi et vous. A l'âge de huit jours, tout mâle parmi vous sera circoncis. »
Etant donné que c’était un enfant juif, le fait qu’il soit circoncis était assez banal. Et Joseph et Marie ont aussi respecté la tradition juive par laquelle on annonce le nom de l’enfant le jour de la circoncision, et ils lui ont donné le nom que l’ange leur avait indiqué (Luc 1.31 et Matthieu 1.21) : Yeshoua (Jésus), qui veut dire l’Éternel est salut. Ce nom ne dit pas que cet enfant est le salut, mais que l’Éternel sauve. Et ce n’était pas le premier enfant à porter ce nom.
- La purification : selon la loi une femme était rituellement impure pendant 40 jours après avoir enfanté un fils (Lévitique 12.1-5) et à l’issue de ce temps de purification, elle devait offrir au temple en sacrifice « un agneau d'un an pour l'holocauste, et un jeune pigeon ou une tourterelle pour le sacrifice d'expiation » (Lévitique 12.6-8). Si elle n'avait pas de quoi se procurer un agneau, elle pouvait « prendre deux tourterelles ou deux jeunes pigeons, l'un pour l'holocauste, l'autre pour le sacrifice d'expiation » (Lévitique 12.8). Joseph et Marie n’avaient pas de quoi offrir un agneau donc ils ont offert le sacrifice des pauvres. Ce qui nous montre que Jésus a grandi dans une famille pauvre.
- La consécration du premier-né, ou le rachat du premier-né : en souvenir de l’œuvre de Dieu qui avait épargné les premiers-nés hébreux lors de la dixième plaie d’Égypte, Dieu avait décrété que tous les premiers-nés lui appartenaient et seraient consacrés à son service (Exode 13.2 et 11-15). Tous les premiers-nés étaient mis à part et avaient la fonction de sacrificateur, jusqu’à ce que Dieu se réserve la tribu de Lévi pour exercer la prêtrise dans le tabernacle (Exode 28.1-2). Les parents ont alors été autorisés à racheter leur fils premier-né, moyennant une redevance de 5 sicles (Nombres 3.40-51). Dieu avait fixé une sorte de rançon à payer, comme pour rappeler au peuple son droit sur les premiers-nés. Marie et Joseph se sont donc acquittés de cette somme d’argent pour racheter leur fils premier-né Jésus. C’est ce qui est sous-entendu dans le verset 23 : « Tout mâle premier-né sera consacré au Seigneur », littéralement il est écrit sera appelé saint au Seigneur, dans le sens mis à part pour Dieu pour son service.
Les parents de Jésus ont donc respecté fidèlement la loi, et Luc insiste sur ce point.
Dans ces quelques versets, il nous le rappelle 5 fois :
- v. 22 : « selon la loi de Moïse »,
- v. 23 : « selon ce qui est écrit dans la loi du Seigneur »,
- v. 24 : « comme cela est prescrit dans la loi du Seigneur »,
- v. 27 : « pour accomplir ce qu’ordonnait la loi » et
- v. 39 : « lorsqu’ils eurent accompli tout ce qu’ordonnait la loi du Seigneur, Joseph et Marie retournèrent en Galilée, à Nazareth leur ville »
Il fallait que Jésus accomplisse toute la loi, comme le parfait représentant de la race juive qu’il était.
Jésus a été un enfant juif ordinaire. Il est né d’une femme, il a respecté la loi et la tradition juive, il a appris à marcher, il a grandi. Il n’est pas venu comme un homme adulte et sûr de lui. Le verset 40 nous dit « qu’il croissait et se fortifiait, il était rempli de sagesse et la grâce de Dieu était sur lui ». Il a connu tous les stades de développement physique et intellectuel. Il a grandi en sagesse et en connaissance.
Dieu a choisi de venir sur cette terre sous la forme d’un homme ordinaire de son temps. Jésus a partagé notre humanité, il a partagé toute l’expérience humaine ordinaire : il a mangé, il a dormi, il a connu la fatigue (Luc 8.23), la faim (Luc 4.2), la tristesse (Matthieu 26.37), le deuil et les larmes (avec son ami Lazare en Jean 11.35), et la pauvreté (Luc 9.58). Il est allé à l’école, du moins à la synagogue pour apprendre la loi de Dieu, il s’est instruit. Il a respecté toutes les étapes de la vie d’un enfant juif de son temps.
S’il était né en occident à notre époque il aurait été enregistré à sa naissance à l’état civil et il aurait suivi ensuite le parcours classique d’un enfant qui va à l’école primaire, au collège, au lycée, qui participe à la journée défense et citoyenneté (JDC) et qui obtient le droit de vote à 18 ans. Un parcours banal et normal.
S’il avait vécu dans un palais et avait été instruit par un précepteur personnel on aurait eu du mal à s’identifier à lui mais il est né dans une famille pauvre, qui habitait une région méprisée, la Galilée, dans une ville banale. Nazareth (v.39), c’était la zone, un bled perdu (voir Jean 1.45-46). Je ne vais pas donner d’exemple actuel pour n’offenser personne, mais vous pouvez penser à une ville qui ne vous fait pas rêver. C’est là que Jésus aurait habité.
Jésus était le Fils de Dieu, donc il aurait pu venir sur un char de feu pour faire des grands discours devant les personnes importantes de ce monde. Mais non, il est venu discrètement habiter parmi nous comme un simple homme. 2 Corinthiens 8.9 :
« Car vous connaissez la grâce de notre Seigneur Jésus Christ, qui pour vous s'est fait pauvre, de riche qu'il était, afin que par sa pauvreté vous fussiez enrichis ».
Nous pouvons donc nous identifier à lui comme le dit l’auteur de l’épître aux Hébreux. Il peut compatir à notre faiblesse, parce qu’il l’a partagée, il peut nous secourir dans la tentation car il a été tenté, il peut nous consoler dans le deuil car il a connu l’horreur de la séparation (voir Hébreux 4.15-16).
Il n’est pas venu comme un chef d’entreprise qui se présenterait devant ses employés pour leur distribuer un cadeau de Noël, non il est venu comme l’un des employés, partager la difficulté de la vie, partager la pauvreté et la misère du monde. Si Jésus était venu à notre époque, il n’aurait pas habité dans une maison luxueuse à Neuilly mais plutôt dans un squat, dans une barre HLM d’une cité dangereuse de Seine Saint Denis, ou dans un bidonville. Vous imaginez le Roi des rois dans un appartement crasseux ? Peut-être que j’extrapole trop mais ce qui est certain c’est que Jésus se serait rendu dans de tels endroits. Dans son ministère Jésus allait auprès des pauvres et auprès des personnes rejetées et en marge de la société.
Et alors que Joseph et Marie accomplissaient en toute simplicité la loi de l’Éternel dans le temple, deux personnes surviennent, deux personnes humbles et pieuses, Siméon et Anne, qui ont su voir au-delà des apparences que ce nourrisson n’était pas seulement un enfant juif ordinaire mais qu’il était destiné à une mission extraordinaire.
Siméon est décrit comme « juste et pieux » (v. 25), ce qui veut dire qu’il entretenait une vraie relation avec Dieu, et Anne est décrite comme une prophétesse qui loue Dieu, qui prie et qui jeûne (v. 36-38). Ils représentent tous les deux le reste pieux d’Israël, le reste d’Israël fidèlement attaché à Dieu et c’est à eux que Dieu a choisi de révéler qui était cet enfant insignifiant. Pourquoi à eux spécifiquement ? Parce que Siméon et Anne attendaient le messie. Siméon avait même reçu la révélation « qu’il ne mourrait point avant d'avoir vu le Christ du Seigneur. » (v. 26)
Le Psaume 25.14 nous dit :
« Le secret de l’Éternel est pour ceux qui le craignent ».
Siméon et Anne aimaient Dieu et le craignaient, c’est pourquoi Dieu leur a donné une révélation spéciale. Ils avaient une disposition de cœur appropriée pour recevoir ce secret mais ce n’est pas par un mérite personnel qu’ils ont eu cette révélation, c’est uniquement l’œuvre du Saint Esprit qui leur a permis de voir au-delà des apparences et de comprendre qui était cet humble enfant. Ce n’était pas le fruit de raisonnements humains, car à vue humaine Jésus n’avait rien pour lui, il n’avait rien pour attirer le regard (Ésaïe 53.2).
Luc insiste de manière appuyée sur le fait que cette révélation est l’œuvre du Saint Esprit :
- v. 25 : « L’Esprit Saint était sur lui »
- v. 26 : « divinement averti par le Saint-Esprit »
- v. 27 : « il vint au temple, poussé par l’Esprit »
Le peuple juif attendait depuis longtemps l’accomplissement de la promesse de Dieu de la venue d’un messie, d’un libérateur, d’un sauveur. Siméon n’attendait pas le règne ou le royaume de Dieu, mais la venue du consolateur d’Israël (v. 25). Ce terme de consolateur d’Israël est un titre messianique qui a même été traduit dans la traduction Semeur en salut d’Israël. L’attente de la consolation d’Israël était basée sur de nombreuses prophéties d’Ésaïe (25.9, 40.1-2, 49.13, 61.2-3, 66.10-11). Et le temps de l’accomplissement de ces promesses était enfin arrivé. Siméon a pris dans ses bras « le Christ du Seigneur » pour reprendre l’expression du v. 26. Christ est le mot grec pour dire le messie, l’oint, celui qui est envoyé pour une mission de délivrance. Et c’est là tout l’enjeu du témoignage vis-à-vis du peuple juif encore aujourd’hui : leur montrer que Jésus est le messie qu’ils attendent encore.
Le drame de notre monde occidental au XXIe siècle, c’est que les gens n’attendent rien ou qu’ils n’attendent qu’un bonheur passager ou des choses matérielles. Leur vision se limite au monde visible qui est éphémère alors que les choses invisibles sont éternelles, nous dit la Bible (2 Corinthiens 4.18).
Et vous qu’est-ce que vous attendez aujourd’hui ? Que l’OL regagne enfin la tête du classement de ligue 1 ? Une promotion professionnelle ? Est-ce que vous attendez encore la venue du messie comme le peuple juif encore aujourd’hui ? Est-ce que vous attendez des réponses à vos questions existentielles ? Est-ce que vous attendez avec impatience d’être enfin délivré de votre corps de chair pour vivre l’éternité dans la présence du Dieu en qui vous avez placé votre confiance et votre foi ?
Demandez à Dieu que le Saint Esprit vous éclaire et illumine l’intelligence de votre cœur pour voir au-delà des apparences.
On ne sait pas exactement comment le Saint-Esprit a révélé à Siméon que le petit enfant Jésus était le consolateur d’Israël. On ne sait pas si c’est par une forte conviction intérieure ou s’il a entendu distinctement une voix, mais il est allé prendre cet enfant dans ses bras. Si j’avais un enfant de 6 semaines, je ne sais pas si je le confierais aux bras d’un vieillard que je ne connais pas. Mais Marie l’a fait, et elle n’a pas été déçue étant donné ce que Siméon a prophétisé sur lui.
Dans les quelques phrases des versets 30 à 32 nous voyons le destin extraordinaire qui sera celui de Jésus. Nous avons déjà vu que Jésus était le messie attendu, le Christ du Seigneur, la consolation d’Israël, mais ce que Siméon prophétise va beaucoup plus loin.
Premièrement, il présente Jésus comme l’auteur du salut, comme LE salut. Siméon peut dire « mes yeux ont vu ton salut. » (v. 30). Il voyait que Jésus était le moyen par lequel Dieu allait racheter son peuple de ses péchés. Même si le salut n'avait pas encore été accompli il y avait virtuellement en Christ le salut de Dieu. Siméon ignorait probablement ce qui allait se passer ensuite : la mort et la résurrection de Jésus. Mais il avait la foi et l’espérance que le messie était le moyen par lequel le salut allait être offert aux hommes. C’est ce que dira plus tard Pierre en Actes 4.12 :
« Il n'y a de salut en aucun autre; car il n'y a sous le ciel aucun autre nom qui ait été donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés. »
Jésus est le salut, pas simplement par ce qu’il est mais par ce qu’il a fait par la suite. Il n’a pas seulement vécu une vie parfaite, sans jamais succomber au péché ; le péché étant tout ce qui déplaît à Dieu. Il a fait bien plus que ça. En étant un homme parfait, en étant Dieu lui-même, il a accepté de donner sa vie sur la croix, comme rançon pour nos péchés.
Nous avons évoqué tout à l’heure la rançon des premiers-nés, eh bien cette image de la rançon est une bonne image pour décrire ce que Jésus a accompli.
C’est comme si Dieu nous avait confié un bien précieux (notre vie), et qu’on l’avait juste détruite en la nourrissant de pensées mauvaises, en la dénaturant, en lui faisait faire des choses qui vont à l’encontre de son mode d’emploi, comme si on déchiquetait jour après jour l’œuvre d’art qu’on nous avait confiée. Nous sommes comme des œuvres d’art, déchiquetés, lacérés, salis par le péché. Forcément la personne qui nous a confié cette œuvre d’art est en droit de nous demander des comptes. Méfiez-vous des apparences, il y aura des comptes à rendre. Vu que l’œuvre d’art est abîmée, qu’elle ne peut plus remplir sa fonction, il y a une dette, une rançon à payer pour la racheter. Le prix de cette rançon, c’est vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent. Le prix de cette rançon est forcément une vie humaine. Mais pour que cette rançon soit suffisante, il faut que ce soit une vie parfaite, celle de Dieu, celle du fils de Dieu qui a accepté de donner sa vie en sacrifice comme rançon de beaucoup de vies (voir Matthieu 20.28, Marc 10.45, 1 Timothée 2.6). Mais il n’est pas seulement mort pour apaiser la justice de Dieu, il est aussi ressuscité en vainqueur de la mort, pour anéantir la malédiction de la mort qui était la conséquence naturelle du péché.
Pour les Juifs c’était une évidence qu’ils n’arrivaient pas à respecter la loi que Dieu leur avait transmises. Ils ne pouvaient que reconnaître leur faillite morale et s’attendre à la miséricorde et au pardon de Dieu. Mais ils ne savaient pas comment Dieu allait bien pouvoir les pardonner. Ils avaient l’habitude de sacrifier des animaux comme substituts pour leurs fautes. Mais ce n’était pas suffisant, il fallait en permanence faire et refaire ces sacrifices dans le temple où a lieu la scène qui nous intéresse aujourd’hui. Et Jésus est apparu une seule fois comme le sacrifice parfait, qui rend maintenant inutiles tous les autres sacrifices animaux.
Et Siméon voyait de ces yeux celui qui était l’auteur du salut. Voilà la mission extraordinaire que Jésus était venu accomplir : anéantir la mort et réconcilier l’homme avec son créateur par le salut qu’il a offert en mourant sur la croix.
Siméon voit le salut, mais ce qui est encore plus incroyable et ce qui remplit d'admiration et d'étonnement Marie et Joseph (v. 33) c’est ce qu’il dit juste après : « Salut que tu as préparé devant tous les peuples, lumière pour éclairer les nations » (v. 31-32). Luc nous avait déjà rapporté que Jésus était le messie juif et l’auteur du salut, mais Siméon affirme ici que Jésus est le sauveur du monde. Il affirme le caractère universel du salut de Dieu et que Jésus est l’envoyé de Dieu pour accomplir le salut pour les hommes et les femmes de toute nation, de toute tribu, de tout peuple, et de toute langue (cf. Apocalypse 7.9). Comment Siméon a-t-il pu avoir ces vues lumineuses sur l’universalité du salut ? Seulement par l’action du Saint Esprit et la connaissance qu’il avait des prophéties comme celle d’Ésaïe 49.6 (voir aussi Esaïe 42.6) :
« C'est peu que tu sois mon serviteur pour relever les tribus de Jacob et pour ramener les restes d'Israël : Je t'établis pour être la lumière des nations, pour porter mon salut jusqu'aux extrémités de la terre. »
Et Jésus s’est présenté dans son ministère comme la lumière du monde en Jean 8.12 :
« Je suis la lumière du monde ; celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie ».
Pour les Juifs de l’époque, c’était un scandale et même les apôtres ont eu besoin d’une révélation spéciale en Actes 10 pour le comprendre. Peur eux le messie était pour le peuple juif. Et ici Siméon cite la révélation faites aux nations, avant la gloire d’Israël. Il place les païens (qu’on appelait les Gentils) en premier. C’était de nature à susciter l’étonnement dans le cœur de Joseph et Marie parce que les révélations qu’ils avaient eues précédemment n’allaient pas si loin. Elles ne présentaient pas Jésus comme le sauveur du monde, des Juifs et des non-juifs. L’apôtre Paul en parle même comme d’un mystère en Éphésiens 3.6 :
« Ce mystère, c'est que les païens sont cohéritiers, forment un même corps, et participent à la même promesse en Jésus Christ par l'Évangile ».
En une phrase, Siméon résume tout l’Ancien Testament et même toute la Bible : de la nation juive devait naître celui qui allait être une source de salut pour tous les hommes. Cette promesse était une promesse millénaire qui avait été faite à Abraham en Genèse 22.18 :
« Toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité, parce que tu as obéi à ma voix. »
Et cette promesse était en train de s’accomplir.
Jésus est d’autant plus une lumière pour les nations que les nations n’avaient pas la révélation prophétique du peuple d’Israël. Les peuples de la terre étaient dans les ténèbres et ne savaient même pas qu’il y aurait une lumière au bout du tunnel. Zacharie dans le cantique du chapitre 1 de Luc, décrit Jésus comme un lever de soleil, comme « le soleil levant [qui] nous a visités d'en haut pour éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort » (Luc 1.78-79). Voilà le destin extraordinaire de Jésus.
Maintenant Siméon peut s’en aller en paix. Il a joué son rôle de sentinelle qui a accompli sa mission et qui peut laisser la place à d’autres. Il me fait penser à Philippidès, le messager grec qui a accompli le premier marathon en courant la distance entre Marathon et Athènes pour délivrer le message de la victoire contre les Perses. Arrivé à l’Aréopage à Athènes, il aurait rendu son dernier souffle juste après avoir délivré la précieuse information.
Siméon n’a pas vu la croix et la résurrection, mais c’est en espérance qu’il est déjà en paix. Et nous sommes dans la même situation, nous n’avons pas assisté en tant que témoins à la mort et la résurrection de Christ, et c’est par la foi que nous sommes sauvés, et que nous pouvons être en paix avec notre propre mort parce que Jésus a vaincu la mort.
Ce destin extraordinaire de Jésus ne peut pas nous laisser indifférent.
On voit déjà cela chez Marie et Joseph qui sont dans l’admiration. Ils devaient halluciner de ce qu’on disait de lui depuis le début, par la bouche de l’ange Gabriel, des mages, de Zacharie et maintenant d’un inconnu qui ouvre des horizons encore plus vastes sur la mission de Jésus. On peut imaginer l’étonnement qui devait les saisir de se dire qu’ils tenaient dans leur bras le sauveur du monde, que Marie allaitait la lumière des nations et qu’ils allaient éduquer la gloire d’Israël. Imaginez qu’on vous annonce que votre fils de 2 mois sera un jour président de la République, ça serait profondément intimidant et même perturbant. Peut-être que ça vous encouragerait mais ça vous mettrait aussi beaucoup la pression. Et le rôle qu’a joué Jésus c’était bien plus que celui d’un président.
Et comme pour éviter que Marie et Joseph s’emballent un peu trop vite, Siméon continue en leur révélant que l’avenir de Jésus ne sera pas tout rose et que son ministère connaîtra une grande opposition. Il allait « devenir un signe qui provoquerait la contradiction. » (v. 34)
Ce qu’il dit dans les versets 34 et 35, c’est que Jésus serait pour certains une pierre d’achoppement et pour d’autres une pierre angulaire. Je m’explique.
L’apôtre Pierre écrit en 1 Pierre 2.7-8 :
« L'honneur est donc pour vous, qui croyez. Mais, pour les incrédules, la pierre qu'ont rejetée ceux qui bâtissaient est devenue la principale de l'angle, et une pierre d'achoppement et un rocher de scandale ; ils s'y heurtent pour n'avoir pas cru à la parole. »
Pour ceux qui rejettent Jésus, pour ceux qui demeurent dans l’incrédulité (qui ne croient pas), Jésus est une pierre d’achoppement, c’est-à-dire une pierre sur laquelle on trébuche, une occasion de chute. Jésus a été rejeté, il a été insulté, il a été détesté. La haine contre lui a été telle qu’elle a conduit les hommes à l'exécuter en le clouant à une croix. Siméon prophétise ce rejet extrême en s’adressant à Marie en particulier lorsqu’il lui dit : « une épée te transpercera l’âme » (v. 35). Marie a été témoin de la crucifixion (Jean 19.25). C’est déjà extrêmement dur de vivre le décès de son enfant. Mais imaginez ce qu’a dû ressentir Marie en étant la spectatrice impuissante du meurtre injuste de son fils et de sa lente agonie publique sur la croix. Quelle horreur ! Vous imaginez assister au meurtre de votre enfant. L’image de l’épée qui transperce l’âme est bien à propos quand on imagine la douleur qu’elle a dû ressentir. Oui Marie allait vivre et ressentir physiquement et émotionnellement la controverse qui allait accompagner le ministère de son fils.
En fait Jésus a plutôt été rejeté, il a plutôt été reçu par l’incrédulité d’Israël (Ésaïe 53.1, Ésaïe 65.1-2) ce qui était révélateur de l’état du cœur de la nation d’Israël. Parce que le problème se situe dans le cœur. La nation d’Israël avait l’apparence de la piété, mais ce qui intéresse Dieu c’est notre cœur.
Est-ce qu’on aime Dieu ou pas ? Est-ce que l’on est prêt à accepter sa grâce et son pardon qu’il nous accorde en Jésus-Christ ? Est-ce qu’on est prêt à enlever l’apparence d’une piété extérieure pour vraiment laisser Dieu régner dans notre vie et dans notre cœur ?
Jésus est la lumière qui éclaire, il est source de salut, mais il dévoile aussi les pensées du cœur (v. 35), il est une source de jugement parce qu’il divise le monde en deux, ceux qui croient en lui et ceux qui ne croient pas en lui. Jésus est la fois une pierre d’achoppement sur laquelle on trébuche par l’incrédulité, et une pierre d’angle sur laquelle on peut bâtir une maison, un rocher sûr et solide qui ne vacille pas.
Ça me fait penser au triage qui avait lieu dans les camps de concentration. Ma grand-mère s’est retrouvée dans cette file d’attente à Auschwitz. Après une forme de sélection, la file se séparait en deux. Elle ne le savait pas encore, mais l’une de ces deux files conduisait directement aux chambres à gaz et à la mort. Je suis désolé si l’image vous choque, mais il est bien question dans notre texte de vie et de mort (de chute ou de relèvement). Nous sommes sur cette terre comme dans une file d’attente avec au milieu la croix où Jésus est mort, cette croix qui révèle les pensées du cœur selon qu’elle produit la foi ou l’incrédulité, l’amour ou la haine à l’égard du crucifié. La croix sépare la file en deux pour deux destins bien distincts.
La question est donc posée en ce début d’année. Sur quoi voulez-vous bâtir l’année qui s’ouvre devant vous ? Est-ce que vous voulez accepter le salut que Jésus offre ? Est-ce que vous voulez vous appuyer sur lui et sur lui seul pour votre vie, votre salut, mais aussi pour vos décisions, vos ambitions ? Sur quoi voulez-vous bâtir votre destinée éternelle ? Vous voulez bâtir sur des réalités visibles passagères ou des réalités invisibles éternelles ?
Et cela nous amène vers la dernière protagoniste de notre passage : la prophétesse Anne. Une femme admirable. Une femme très âgée pour l’époque. On peut traduire le v. 37 de deux manières, soit elle était âgée de 84 ans, soit elle était veuve depuis 84 ans, ce qui voudrait dire qu’elle avait plus de 100 ans. Quoi qu’il en soit, pour l’époque elle était âgée. Elle représente la persévérance du reste fidèle d’Israël, consacrée à Dieu dans une piété qui s’exprime par une prière quotidienne intense, une supplication à laquelle elle associe le jeûne. Elle consacrait son veuvage à la louange, et la prière, au service du temple. Le veuvage, comme le célibat est une occasion de service car la disponibilité de temps est plus grande. Ne laissez pas passer cette opportunité dans votre vie. N’attendez pas l’étape suivante, rendez-vous disponible pour Dieu dès maintenant si vous avez du temps. Le célibat et le veuvage sont de formidables occasions de service.
On ne sait pas si Anne a assisté à la prophétie de Siméon mais elle est survenue elle aussi à cet instant. Elle était elle-même prophète et le Saint-Esprit lui a révélé qui était ce petit enfant. Sa réaction immédiate a été de vouloir propager cette bonne nouvelle à ceux qui attendaient « la délivrance de Jérusalem » (v. 38), la délivrance qui allait être opérée à Jérusalem par le Christ. Anne a été en quelque sorte l’une des premières évangélistes. Elle a voulu témoigner de la bonne nouvelle dont elle a eu connaissance. Un peu comme les disciples en Actes 4.20 qui disent : « nous ne pouvons pas ne pas parler de ce que nous avons vu et entendu ».
Un chrétien qui a vraiment compris à quel point la nouvelle de la venue d’un libérateur est une offre de salut pour tous les hommes, il ne peut que vouloir partager cette bonne nouvelle, pour devenir un chrétien contagieux, un chrétien qui témoigne de l’espérance qui l’habite. Prions que Dieu nous donne un nouveau zèle pour l’Évangile en ce début d’année, que nous soyons saisis tout à nouveau par la beauté de l’œuvre de Jésus qui est venu « chercher et sauver ce qui était perdu » (ce qu’il dit de lui en Luc 19.10).
Prions que Dieu fasse de nous des flambeaux qui rendent témoignage à la lumière, que nous ne soyons pas comme accoutumés, anesthésiés par cette bonne nouvelle à laquelle nous nous serions habitués comme si c’était une information parmi d’autres. Prions que Dieu mette dans notre cœur comme un feu dévorant (Jérémie 20.9), et que ça devienne intenable de ne pas partager cette bonne nouvelle autour de nous.
Je voulais terminer en rappelant que nous sommes nous aussi dans une position d’attente, comme Anne et Siméon qui attendaient la venue du messie, nous sommes dans l’attente de son retour glorieux qui mettra un terme à ce monde enténébré dans lequel nous vivons.
À l’instar d’Anne pourrions-nous prier et même jeûner dans l’attente de sa seconde venue ?
Paul nous enseigne en Tite 2.11-13 l’attitude qui doit être la nôtre dans cette attente (version Semeur) :
« La grâce de Dieu s'est révélée comme une source de salut pour tous les hommes. Elle nous éduque et nous amène à nous détourner de tout mépris de Dieu et à rejeter les passions des gens de ce monde. Ainsi nous pourrons mener, dans le temps présent, une vie équilibrée, juste et pleine de respect pour Dieu, en attendant que se réalise notre bienheureuse espérance : la révélation de la gloire de Jésus-Christ, notre grand Dieu et Sauveur. »