Dis-moi ce que tu aimes

Par Alexandre Sarranle 1 août 2021

Je vais commencer par une question très directe ce matin. Est-ce que vous êtes un vrai chrétien ?

Bien sûr, il est possible que vous soyez venu au culte aujourd’hui sans aucune prétention. Peut-être que vous ne vous dites pas chrétien et que vous êtes là pour observer et découvrir, et si c’est le cas, on est vraiment ravi de votre présence ! Le culte est une réunion publique, principalement destinée aux chrétiens, certes, puisqu’on est là pour adorer Dieu—Père, Fils et Saint-Esprit—mais c’est une réunion ouverte à tous, et on est toujours très heureux d’accueillir des gens de toute origine et de tout arrière-plan religieux ou philosophique.

Mais si vous vous dites chrétien ce matin, est-ce que vous êtes un vrai chrétien ? Et comment est-ce que vous pouvez le savoir ?

La Bible est assez claire sur le fait que, de tout temps, il y a eu des gens qui ont porté une étiquette religieuse, extérieurement, sans que ça ne soit nécessairement l’expression d’une réalité intérieure. Des gens peuvent se dire chrétiens, et même se croire chrétiens, sans qu’ils aient réellement, selon Dieu, le genre de foi qu’ils devraient avoir en lui pour pouvoir être considérés comme de véritables disciples de Jésus-Christ. C’est donc une question sérieuse.

Est-ce que vous êtes un vrai chrétien ? Qu’est-ce que c’est, d’après la Bible, un vrai chrétien ? Comment s’examiner soi-même pour savoir si notre foi correspond vraiment à ce que Dieu attend de nous ? Et si on traverse une période de doute, où on n’est plus sûr de rien, vers quoi est-ce qu’on peut se tourner pour savoir si on appartient vraiment à Dieu ? Voilà des questions auxquelles on va essayer de répondre avec l’aide du texte qu’on va prendre aujourd’hui.

Et si vous n’êtes pas chrétien, ça peut vous intéresser aussi de savoir comment la Bible elle-même décrit ce que c’est qu’une foi chrétienne authentique.

Alors on va prendre un passage tiré d’une lettre de l’apôtre Jean, où un des trucs qui préoccupe vraiment cet apôtre, c’est qu’il veut aider les chrétiens de son époque, justement, à discerner entre les vrais croyants et les faux croyants. L’apôtre Jean est inquiet parce qu’il y a des idées étrangères à la foi chrétienne qui commencent à circuler dans les églises sous couvert de christianisme—et il veut démasquer ces faux enseignements, tout en confortant les vrais chrétiens dans leur foi.

Il veut que les vrais chrétiens se rassurent et qu’ils tiennent bon face à la tentation de se détourner de la foi ; et il veut que les faux chrétiens se remettent en question et qu’ils deviennent, si possible, de vrais chrétiens !

Et voici l’argument principal qu’il va donner à ses destinataires pour qu’ils puissent discerner si ils sont sur le bon chemin ou non (et nous aussi par la même occasion), bref, pour voir si on est de vrais chrétiens : c’est que quand on connaît vraiment Dieu, ça change ce qu’on aime au fond. Quand on connaît vraiment Dieu, ça change nos inclinations, nos affections profondes, ce qu’on désire et qu’on recherche, au moins avec l’intelligence ; bref, pour diagnostiquer la nature de ta foi en Dieu, regarde ce que c’est que tu aimes, au fond.

1/ Quand on connaît Dieu, on aime ses commandements (v. 1-6)

Quand on connaît vraiment Dieu, ça change ce qu’on aime au fond. Alors je vais expliquer plus précisément ce que je veux dire par là—et ce que je ne veux pas dire par là—, mais d’abord, regardons le texte. Premier point : quand on connaît Dieu, on aime ses commandements.

Prenons les versets 1-6 pour commencer, et même 1-2. L’apôtre Jean pose un fondement extrêmement important au début de ce passage, qui est censé éclairer tout ce qu’il va dire par la suite. Aux versets 1-2, il rappelle ce que c’est qui fait qu’une personne peut avoir une bonne relation avec Dieu, c’est-à-dire être en communion avec lui. Il va parler à partir du v. 3 de comment savoir si on est en communion avec Dieu, mais d’abord il veut être bien clair sur la manière dont cette communion est possible.

Il en a déjà parlé au premier chapitre, en évoquant la merveilleuse grâce de Dieu qui nous présente un moyen d’être pardonnés de nos péchés et purifiés de toute injustice, c’est-à-dire d’être délivrés de tout ce qui nous empêchait d’être en communion avec Dieu. Et Jean poursuit au début du chapitre 2, en insistant là-dessus.

Il vient de dire (ch. 1) : « Écoutez, on est tous des pécheurs. On a ce mal en nous qui nous prive de la communion avec Dieu. Mais Dieu peut enlever cet obstacle, et le moyen de cette délivrance, c’est le sang de Jésus son Fils qui nous purifie de tout péché (cf. 1.7). Et je veux que vous preniez conscience de l’ampleur de cette grâce que Dieu nous présente en Jésus ! »

Et au chapitre 2 : « Je vous écris ceci, afin que vous ne péchiez pas ! Mon but, en vous rappelant cette bonne nouvelle, c’est que vous soyez plein de reconnaissance et d’amour envers Dieu de sorte que vous allez rechercher ce qui plaît à Dieu et rejeter ce qui lui déplaît. Mais je sais que vous n’allez pas pouvoir faire ça pleinement ou parfaitement. Écoutez ce que j’ai à vous dire ! Si quelqu’un a péché—ou plutôt quand quelqu’un a péché, c’est-à-dire un croyant, l’un de vous—Jésus continue perpétuellement de préserver votre communion avec Dieu. Il est à la fois notre avocat (en grec, un paraclet, quelqu’un qui nous aide, qui intercède pour nous), il est parfaitement juste (c’est-à-dire qu’il a pleinement la faveur de Dieu), et il est lui-même l’expiation pour nos péchés (c’est-à-dire que sa propre personne représente le paiement du prix pour que nos péchés soient effacés). »

Donc Jésus s’est substitué aux croyants sur la croix pour s’offrir lui-même, volontairement, en sacrifice, pour payer le prix de notre pardon, de notre purification et de notre communion avec Dieu. Il est ensuite ressuscité et il se trouve maintenant auprès de Dieu le Père, dans le ciel, et il nous défend en permanence, il plaide pour nous, il continue perpétuellement de recouvrir nos péchés de son sang, pour ainsi dire, en présentant à Dieu le Père, sans relâche, l’offrande de ses souffrances à la croix, et c’est une offrande dont la valeur est inépuisable.

Jean précise d’ailleurs que ce sacrifice de Jésus est d’une valeur si grande qu’il recouvre tous les péchés de tous les croyants de toute l’histoire du monde entier (v. 2).

Écoutez bien : il est impossible d’épuiser la grâce de Dieu qui nous est présentée en Jésus-Christ. On ne peut pas en venir à bout. Il est impossible de pécher tellement qu’on arriverait à un point où il ne resterait plus assez de mérites dans le sacrifice de Jésus pour qu’on puisse être pardonné. Il n’arrivera jamais qu’un jour, Jésus sera en train de me défendre au ciel, et qu’il dira à Dieu le Père : « Mince, Alex a encore péché, mais il a déjà dépensé tous les mérites de mon sacrifice—j’ai beau chercher, j’ai beau racler les fonds de tiroir, il n’en reste plus ! Je n’ai plus rien pour lui ! »

C’est impossible, parce que Jésus, l’expiation pour nos péchés, n’est pas simplement un homme supérieur aux autres, il est l’homme-Dieu. Ses deux natures sont distinctes mais indissociables en sa personne, et donc c’est Dieu le Fils lui-même qui se présente à Dieu le Père en paiement pour nos péchés, et c’est donc un paiement d’une valeur infinie.

C’est comme une assurance tous risques. Le principe d’une assurance tous risques, c’est que vous pouvez avoir n’importe quoi comme sinistre (comme accident), vous n’aurez pas à débourser un seul centime. Tout sera couvert par l’assurance, même si l’accident est de votre faute. Imaginez maintenant une assurance tous risques où la souscription elle-même serait gratuite ! Vous êtes couvert à 100% contre tout, même quand c’est de votre faute, et vous n’avez même pas à payer quoi que ce soit pour en bénéficier.

Il y en a qui entendent ça et qui se disent : « Eh bien si j’ai une assurance comme ça, je vais vivre n’importe comment ! Je vais complètement arrêter de faire attention, puisque quoi qu’il arrive, ce sera couvert. » Oui mais. Ce n’est pas parce que ça ne vous coûte rien à vous, que ça ne coûte rien à personne. Si vous provoquez un accident et que vous n’avez rien à débourser, c’est que les dégâts sont payés par quelqu’un d’autre.

Imaginez que ces dégâts soient toujours payés par la même personne, et que cette personne c’est aussi celle qui vous offre ce contrat d’assurance tous risques, à titre gratuit, mais à ses propres frais à elle. Écoutez bien : votre manière de vivre en conséquence va en dire très long sur la nature de la relation que vous avez avec cette personne.

C’est ce qui nous amène directement au verset 3. Si je suis resté aussi longtemps sur les versets 1-2, c’est parce que c’est en comprenant bien par quel moyen on peut être en communion avec Dieu qu’on peut bien comprendre pourquoi l’apôtre Jean va dire juste après (v. 3) que quand on connaît vraiment Dieu, on va garder ses commandements.

Il le dit assez explicitement au verset 5 :

« Celui qui garde sa parole [la parole de Christ], l’amour de Dieu [l’amour qu’il a pour Dieu] est vraiment parfait en lui. »

Autrement dit : Dieu a manifesté son amour pour les croyants en payant de lui-même le prix de notre communion avec lui, et si on aime en retour celui qui nous aime tellement qu’il fait valoir perpétuellement en notre faveur le prix du pardon de nos péchés—si on l’aime vraiment—alors, il est impossible qu’on vive en se fichant de ce qui lui plaît et de ce qui lui déplaît. Il est impossible qu’on vive en se fichant de ce que Dieu recouvre ou non de sa grâce.

Si on aime Dieu, il est impossible qu’on vive en se fichant de ce qui fait l’objet, ou non, chaque jour dans notre vie, de la purification opérée par le sang du Fils de Dieu, et de ce qui fait l’objet, ou non, de l’expiation que notre avocat présente perpétuellement à Dieu le Père. Si on est vraiment sensible à l’amour que Dieu nous a manifesté en Jésus, il est impossible de continuer à pécher en se disant : « M’en fous, c’est Jésus qui paie. » Impossible.

Et voilà donc toute la teneur de ce premier point : quand on connaît Dieu, on aime ses commandements. Quand on connaît Dieu vraiment, par le moyen de la mort, de la résurrection et de l’intercession perpétuelle de Jésus, quand on comprend et qu’on contemple et qu’on médite sur cette bonne nouvelle et sur cette grâce merveilleuse et intarissable, on va vouloir suivre notre Sauveur bien-aimé. On va avoir envie de le suivre. C’est évident, non ?

Si vous êtes sincèrement amoureux de quelqu’un, vous allez naturellement faire attention à comment vous allez vous comporter avec cette personne. Ça ne va pas être parfait, mais vous allez faire attention. Vous allez être sensible à cette personne. Vous allez avoir envie de tenir compte d’elle. Bref, vous l’aimez ! Et c’est sûrement parce que vous voyez en cette personne des choses qui la rendent aimable, voire adorable à vos yeux.

Eh bien quand on réfléchit à l’évangile, ça devrait rendre Dieu adorable à nos yeux ! L’apôtre Jean le dira un peu plus loin :

« Voyez quel amour le Père nous a témoigné, pour que nous soyons appelés enfants de Dieu ! » (1 Jn 3.1, Segond)

Quand on connaît Dieu vraiment, on ne peut que l’aimer, tellement il nous aime en Christ. On ne peut que vouloir lui faire confiance. On ne peut que vouloir s’attacher à lui, et demeurer en lui, et garder sa parole, et marcher à sa suite. Est-ce que c’est ce que vous voulez ?

Voilà la question que l’apôtre Jean veut qu’on se pose pour commencer, si on veut savoir si on est un vrai chrétien. Est-ce qu’on a la volonté, l’envie, l’intention de faire ce qui plaît à Dieu ? L’apôtre Jean dit : « Celui qui dit : Je l’ai connu, et qui ne garde pas ses commandements, est un menteur. » (v. 4) Il ne veut pas dire qu’un vrai chrétien, c’est quelqu’un qui garde parfaitement, toujours, tous les commandements de Dieu. Il veut dire que c’est quelqu’un qui veut orienter sa vie dans ce sens.

Ce que Jean vise, dans cette affirmation, c’est l’intention de notre intelligence. Il a déjà dit que de toute façon, on allait continuer de pécher (et que Jésus allait continuer de nous défendre). Donc il ne prétend pas qu’on doit être parfait. Ce que Jean veut dire, c’est que quelqu’un qui connaît vraiment Dieu, qui répond vraiment à son amour, c’est quelqu’un qui reçoit la parole de Dieu comme règle pour sa vie (cf. Jn 14.21-24).

La question qui nous est posée par ce texte, ce n’est pas : « Est-ce que tu obéis à 100% aux commandements de Dieu ? », mais plutôt ; « Est-ce que tu souscris à 100% aux commandements de Dieu ? » Ou pourrait même paraphraser le texte : « À ceci nous reconnaissons que nous l’avons connu : si nous [souscrivons à] ses commandements. »

Et donc c’est une question-diagnostic que l’apôtre Jean nous propose ici, pour savoir si on est un vrai chrétien : est-ce que j’aime les commandements de Dieu, au moins en principe, au moins théoriquement, au moins avec mon intelligence ? Indépendamment même de ce que sont les commandements de Dieu, est-ce que j’ai la posture de les recevoir tout simplement parce qu’ils viennent de Dieu et que j’aime Dieu qui est digne de confiance ?

Bien sûr, on a encore une nature déchue, le péché habite encore en nous, et notre nature déchue—notre chair—nous fait désirer des choses contraires aux commandements de Dieu. Mais est-ce que j’aime les commandements de Dieu, de sorte que le constat de cette lutte intérieure me rend inconfortable, et m’attriste ? Est-ce que je peux dire comme l’apôtre Paul :

« Je prends plaisir à la loi de Dieu, dans mon for intérieur, mais je vois dans mes membres une autre loi, qui lutte contre la loi de mon intelligence et qui me rend captif de la loi du péché qui est dans mes membres. » (Rm 7.23)

Si cette lutte nous est douloureuse, c’est bon signe ! C’est parce que quand on connaît vraiment Dieu, même si on continue de pécher, on aime au fond ses commandements.

2/ Quand on connaît Dieu, on aime les autres croyants (v. 7-11)

Deuxième point : quand on connaît Dieu, non seulement on aime ses commandements, mais on aime aussi les autres croyants. Revenons au texte.

Rassurez-vous, je serai un peu plus court pour ce deuxième point. On a parlé longuement, à partir des versets 1-2, de ce que c’est qui fait qu’une personne peut avoir une bonne relation avec Dieu, grâce à la personne et l’œuvre de Jésus-Christ. On ne va pas revenir là-dessus, mais il faut se rappeler que cette bonne nouvelle, de sa mort, sa résurrection, et de son intercession perpétuelle, c’est vraiment le fondement sur lequel s’appuie tout ce que dit l’apôtre Jean par la suite, concernant l’amour pour la parole de Dieu, et l’amour pour les frères et sœurs dans la foi.

Et donc à partir du verset 7, puisque Jean vient de parler de l’importance de garder les commandements de Dieu, il va faire référence maintenant à un commandement en particulier, qu’il appelle à la fois un « commandement ancien » et un « commandement nouveau. » C’est un peu curieux ce qu’il dit, mais on comprend, quand on arrive aux versets 9-10, qu’il parle du commandement « d’aimer son frère », c’est-à-dire d’aimer les autres croyants.

Ça devrait nous faire penser à cette parole de Jésus, que l’apôtre Jean, justement, avait rapportée dans son évangile :

« Je vous donne un commandement nouveau : Aimez-vous les uns les autres ; comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13.34-35)

Et donc maintenant, en rappelant cette instruction de Jésus, Jean dit aux chrétiens de son époque : « Vous voyez, ce n’est pas nouveau comme commandement ! Ça fait longtemps que vous l’avez entendue, celle-là ! Non seulement le Seigneur l’a enseigné quand il était sur la terre, mais en plus ça remonte à la loi de Moïse (Lv 19.18). Aimer son frère dans la foi, ce n’est pas nouveau. Et en même temps, ça reste nouveau dans le sens où c’est une exigence qui est toujours de première importance et qui ne devient jamais désuète ou ringarde ou dépassée. C’est un commandement qui ne vieillit pas. »

Sur ce passage, d’ailleurs, Jean Calvin fait ce commentaire :

« Saint Jean dit que cette doctrine de la dilection et charité fraternelle n’est point telle qu’elle perde son cours et sa saison avec le temps, mais elle a une vigueur perpétuelle, en sorte qu’elle est aussi bien la dernière perfection, que l’apprentissage. »

Je vous rappelle que Jésus lui-même a dit que les deux plus grands commandements, qui résument toute la loi de Dieu, consistent à aimer Dieu et à aimer son prochain (Mt 22.36-40).

Et on a l’impression que l’apôtre Jean ajoute encore une couche à l’importance de ce commandement, en faisant référence aux ténèbres qui passent et à la lumière qui brille (v. 8). C’est une allusion au fait que Jésus est mort et ressuscité, et donc qu’il y a une victoire qui a été gagnée contre les ténèbres, et que maintenant, la lumière de la vérité est en train de briller de manière nouvelle dans le cœur des croyants d’une part, et dans le monde d’autre part, par le moyen de la vie transformée des croyants, et par le témoignage des croyants auprès des non-croyants.

Bref, la lumière a brillé dans les ténèbres par la venue de Jésus, elle brille dans la vie des croyants par la connaissance qu’ils ont de la vérité, et elle se répand dans le monde par l’annonce de l’évangile, par la conversion des gens, et par la mise en pratique de la parole de Dieu. Mais Jean dit que celui qui n’aime pas son frère n’est pas dans cette lumière ; tandis qu’au contraire, celui qui aime son frère se tient dans la lumière et « ne risque pas de tomber » (v. 10). Littéralement : « il n’y a pas de scandale en lui ».

Alors il y a deux manières de comprendre ça, qui sont complémentaires : d’une part, celui qui aime ses frères et sœurs dans la foi est en bonne posture pour grandir lui-même dans la foi et pour prendre part au projet de Dieu qui consiste à répandre sa lumière dans notre vie et dans le monde. D’autre part, celui qui aime ses frères et sœurs dans la foi, rend témoignage par cet amour, à l’authenticité de l’évangile auquel il dit croire, et dans ce sens, « il n’y a pas de scandale en lui », c’est-à-dire qu’il ne rend pas de contre-témoignage par rapport à l’évangile. C’est ce qu’a dit Jésus, comme on l’a rappelé :

« À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13.35)

Quand on y pense, il n’y a rien de plus logique pour un vrai chrétien que d’aimer les autres chrétiens. Pourquoi ? Tout simplement parce que Dieu les aime !

Encore une fois, si vous avez déjà été amoureux de quelqu’un, ce serait complètement bizarre de faire preuve de mépris ou de dégoût envers des choses que cette personne, elle, affectionne beaucoup ! « Oh, ma chérie, je t’aime de tout mon cœur—par contre ne me demande pas de m’intéresser à tous ces trucs qui te passionnent, parce moi, perso, ça me gonfle, je ne te dis pas comment ! »

Ça semble un peu bizarre, non ? Peut-être encore plus si on parle de personnes que notre amoureux(se) affectionne. « Mon petit lapin d’amour, je suis fou amoureux de toi, tu es la personne la plus importante pour moi et je pense à toi tous les jours—par contre j’en n’ai rien à cirer que tu aimes beaucoup tes parents et tes frères et sœurs, perso, je ne peux pas les encadrer et je n’ai absolument pas envie de les connaître ou de les fréquenter. »

Bizarre ! Vous voyez la contradiction ? C’est un peu ce que dit l’apôtre Jean dans ce passage. Dire qu’on aime Dieu, sans aimer les gens que Dieu aime, c’est contradictoire.

Et donc c’est aussi une question qui nous est posée dans ce texte : est-ce qu’on reconnaît la valeur infiniment précieuse de la relation qu’on a avec les autres chrétiens ? Si on professe la foi en Jésus-Christ, on n’est pas des étrangers les uns pour les autres, on est, dans un sens très, très fort, des frères et sœurs.

Si la personne à côté de toi a placé sa confiance en Dieu, si elle est attachée à Jésus par la foi, et si c’est ton cas aussi, eh bien vous avez le même Père ! Et Dieu le Père ne t’aime pas plus qu’elle, ni elle plus que toi. Dieu t’a tellement aimé qu’il a pourvu à ton salut, par le sang de Jésus son Fils qui te purifie de tout péché (cf. 1.7), et l’amour qu’il t’a manifesté, il l’a manifesté pour tous ses enfants.

Comment oserais-tu mépriser ton frère ou ta sœur dans la foi, que Dieu a tant aimé ? Comment oserait-on rejeter celui ou celle que Dieu a accueilli à un si grand prix ?

Comment, si on connaît vraiment Dieu, si on l’aime vraiment, si on est vraiment sensible à ce qu’il a fait pour nous par Jésus-Christ, comment pourrait-on négliger la communion de l’Église, qui est la maisonnée de Dieu, notre famille spirituelle ? Comment pourrait-on reléguer notre relation avec les frères et sœurs chrétiens au second rang de nos relations humaines, derrière nos relations avec les copains de classe, les collègues de travail, ou les voisins ? Bien sûr, toutes ces relations sont importantes, mais si Dieu a pour son Église un amour particulier, l’amour de l’alliance, un amour sacrificiel, un amour spécial et prioritaire, pourrait-on dire, et si nous, on aime vraiment ce Dieu-là, eh bien est-ce qu’on ne devrait pas logiquement avoir pour sa famille, qui est la nôtre aussi, le même genre d’amour ?

Non seulement c’est logique, mais en plus, nos frères et sœurs dans la foi ont besoin de notre amour, et nous du leur. Et tenez-vous bien : le monde même a besoin de notre amour pour les frères et sœurs dans la foi, parce que cet amour rend témoignage à l’authenticité de l’évangile qu’on veut leur annoncer, pour que la lumière de la vérité se répande, et que les ténèbres reculent, pour la gloire de Dieu.

Quand on connaît Dieu, donc, quand on le connaît vraiment, on aime les autres croyants.

Et maintenant pour conclure.

On a commencé par cette question tout-à-l’heure : est-ce que vous êtes un vrai chrétien ? Et on a vu dans ce passage, d’abord par quel moyen on pouvait avoir une bonne relation avec Dieu, c’est-à-dire être en communion avec lui. On a vu que c’était grâce à la mort, la résurrection, et maintenant l’intercession perpétuelle de Jésus que c’était possible. Et donc il y a une question qui se pose en priorité pour nous tous ce matin : est-ce que j’ai placé ma foi en Jésus ? Est-ce que sa grâce merveilleuse a touché mon cœur, est-ce que je suis vraiment sensible à son amour, au point de l’aimer en retour ?

Si vous vous sentez interpelé par Dieu ce matin, ne le repoussez pas. Cherchez Dieu et il se révélera à vous. Tournez-vous vers la Bible et vers d’autres croyants, posez vos questions, approfondissez votre connaissance de Jésus à travers la lecture des évangiles. Et si vous n’avez jamais été baptisé et si vous n’avez jamais pris d’engagement public à suivre Jésus, peut-être que c’est quelque chose que Dieu vous appelle à faire. Parlez-en aux responsables de l’église, dès aujourd’hui !

Mais peut-être que vous avez déjà fait ces choses, peut-être même que ça fait de nombreuses années que vous avez une vie dite « chrétienne », où vous allez à l’église le dimanche et où vous fréquentez d’autres croyants. Mais est-ce que votre pratique extérieure correspond à une réalité intérieure ? Est-ce que votre foi correspond vraiment à ce que Dieu attend de vous ?

Et ce qu’on a vu à travers ce texte, c’est que quand on connaît vraiment Dieu, ça change ce qu’on aime au fond. C’était toute la leçon de ce passage. Quand on connaît Dieu, on aime ses commandements, et on aime les autres croyants—et ça, ce ne sont pas des choses qui viennent naturellement, mais ce sont des choses qui découlent de notre sensibilité à l’évangile. C’est l’expression d’un amour authentique pour Dieu, qui répond à son amour pour nous.

Et donc si tu t’examines toi-même ce matin, et que tu ne vois pas, dans ton for intérieur, cette envie de suivre Dieu, et cette affection pour la communauté de l’Église, tu as besoin de méditer de nouveau sur les versets 1-2 de notre passage. Tu as besoin de réfléchir de nouveau à l’étendue de la grâce de Dieu, qui t’est présentée en Jésus-Christ.

Mais peut-être que tu traverses une période de doute, depuis des semaines ou des mois. Tu n’arrives pas à prier ou à lire la Bible, tu succombes facilement à diverses tentations et tu te demandes franchement si tu es vraiment un chrétien après tout. Ne regarde pas d’abord à ce que tu fais, mais regarde d’abord à ce que tu crois. Est-ce que Jésus est vraiment Dieu le Fils, mort et ressuscité pour ton salut ? Est-ce qu’il intercède pour toi encore aujourd’hui ? Est-ce que les mérites de son sacrifice sont vraiment inépuisables ? Est-ce que les commandements de Dieu sont saints, justes et bons (cf. Rm 7.12) ? Est-ce que tu es peiné par ta situation ? Est-ce que tu as envie que Dieu fasse de nouveau briller sa face sur toi ? Est-ce que tu crois à l’importance de rester attaché à la communauté des croyants, et est-ce que tu désires que les frères et sœurs prient pour toi, qu’ils t’entourent, te consolent et t’encouragent ?

Si ce sont là tes inclinations profondes, ce que tu désires, ce que tu recherches, au moins avec l’intelligence, alors tu es un enfant de Dieu, parce que ces aspirations-là ne peuvent pas venir de la chair, mais seulement de l’Esprit-Saint.

On attribue à Martin Luther cette expression en latin qui décrit la condition de tout croyant véritable : simul justus et peccator. Ça veut dire : « À la fois juste et pécheur ». On est juste en Christ aux yeux de Dieu, en vertu de sa grâce. Mais on continue d’être pécheurs et de pécher, parce qu’on est encore prisonniers, en quelque sorte, de ce corps de mort (comme dit l’apôtre Paul). Mais quand même, si on est chrétien, il y a quelque chose qui a changé. On a changé de posture. On aime Dieu au fond, et parce qu’on l’aime, on aime sa parole et on aime sa famille.

Voici donc un exercice qu’on peut tous faire cette semaine : c’est lire le Psaume 119, doucement, tranquillement, en le méditant, et en priant que Dieu réalise en nous la posture et l’attitude de l’auteur de ce psaume devant la parole de Dieu (c’était au programme du plan de lecture il y a deux ou trois semaines). Que ce soit notre prière pour l’année qui vient !

Voici autre chose qu’on peut faire : c’est décider de s’investir encore plus cette année dans la vie de nos frères et sœurs dans la foi. Ça commence bien sûr par sanctifier le jour du Seigneur, c’est-à-dire préserver son dimanche, autant que possible, pour venir au culte et passer du temps avec nos amis dans la foi. Mais c’est aussi prendre des nouvelles dans la semaine, participer à un groupe de maison, et prier les uns pour les autres.

Est-ce qu’on a envie de ces choses ? Alors on est sur la bonne voie, par la grâce de Dieu !

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