La royauté de Christ

Par Denis Blumle 2 avril 2023

Je ne sais pas quelle image vous avez à l’esprit quand on évoque un couronnement royal ou impérial. Vous pensez peut-être au sacre de Napoléon et au fameux tableau de Jacques-Louis David. Vous avez peut-être à l’esprit les images d’archives du couronnement d’Élisabeth II et de toute la procession fastueuse qui l’a accompagnée. Si vous êtes moins portés sur l’histoire et plus cinéphile, c’est peut-être pour vous le couronnement d’Aragorn dans Le retour du roi (le 3e épisode du Seigneur des anneaux) qui représente le mieux les festivités et la joie qui accompagnent un tel évènement.

Si vous êtes français, l’idée d’un couronnement royal vous laisse peut-être de marbre, car il ne s’agit plus de notre modèle politique, et vous êtes peut-être bien contents de ne pas avoir à entretenir une famille royale sur les deniers publics. Je ne suis pas en train de tenir un propos royaliste ou antiroyaliste (on ne fait pas de politique à l’église) mais le texte du jour va nous amener à assister à une procession royale, un cortège royal, et j’espère que vous allez découvrir à travers ce passage que Jésus est le roi dont nous avons tous besoin. Il n’est bien sûr pas question ici d’un roi politique mais d’un roi spirituel qui veut régner en premier sur notre cœur. Et nous allons nous attacher à étudier les raisons pour lesquelles Jésus est le roi dont nous avons tous besoin.

Voici les 7 raisons que nous allons voir dans le texte, parce qu’il est :

1/ Un Roi divin (v. 28-34)

2/ Un Roi humble (v. 35-36)

3/ Un Roi rédempteur (v. 37-40)

4/ Un Roi compatissant (v. 41-42)

5/ Un Roi qui juge (v. 43-44)

6/ Un Roi qui purifie (v. 45-46)

7/ Un Roi qui interpelle (v. 47-48)

Et voici le texte qui permet d’affirmer toutes ces caractéristiques : Luc 19.28-48.

1/ Un Roi divin (v. 28-34)

Le premier élément qui est à souligner dans ce passage, c’est que Jésus est un roi divin. C’est lui qui maîtrise les circonstances et ce ne sont pas les circonstances qui le maîtrisent ou qui s’imposent à lui. Dans l’évangile de Luc, l’auteur nous présente le ministère de Jésus comme une lente montée jusqu’à Jérusalem dès le chapitre 9 verset 51 où il nous dit : « Lorsque le temps où il devait être enlevé du monde approcha, Jésus prit la résolution de se rendre à Jérusalem ». Et nous arrivons avec notre passage au point culminant de cette lente ascension : Jésus va rentrer dans la ville sainte comme un roi victorieux, acclamé par la foule. Et Jésus marche devant cette foule en approchant de Jérusalem (v.28). Ce n’est pas la foule qui le pousse, c’est lui qui avance délibérément vers le point culminant de son ministère et de toute la révélation de Dieu dans l’Ancien Testament. Il amorce avec notre épisode la dernière semaine avant sa crucifixion.

Il passe par Bethphagé et aussi à Béthanie (v. 29) qu’il connait bien car il avait régulièrement séjourné dans cette ville lors de ses visites à Jérusalem. Béthanie est la patrie de Marthe, Marie et de son ami Lazare qu’il a ressuscité des morts (Jean 11.1-45). Dans le récit qu’en fait Jean, il précise bien « Six jours avant la Pâque, Jésus arriva à Béthanie, où était Lazare, qu'il avait ressuscité des morts » (Jean 12.1). C’est un élément important :ce miracle de la résurrection atteste de la nature divine de Jésus car seul Dieu a le pouvoir de donner la vie ou de redonner la vie.

Mais l’élément qui atteste de la divinité de Jésus dans notre passage, c’est son omniscience sur les circonstances qui vont accompagner son entrée triomphale dans Jérusalem. On pourrait même parler de préscience car il sait à l’avance ce qui va se passer. Il demande à ses disciples d’aller chercher un ânon dans un village et Jésus est capable de savoir où est l’ânon précisément, quelle attitude auront les propriétaires et comment il faudra leur répondre. Le match est joué d’avance car Jésus est omniscient, il connait toutes choses et il n’appartient qu’à Dieu seul de connaître les choses qui sont absentes. Jésus avait déjà montré à ses disciples qu’il possédait cet attribut divin lors de l’appel de Nathanaël en Jean 1.48 ou lors de l’épisode de la pièce (du statère) qui était dans la bouche du poisson en Matthieu 17.24-27, et cette omniscience se manifestera aussi pour la préparation de la Pâque en Luc 22.10-13 :

« Il dit à ses disciples : vous rencontrerez un homme portant une cruche d'eau ; suivez-le dans la maison où il entrera.[…] Ils partirent, et trouvèrent les choses comme il le leur avait dit, et ils préparèrent la Pâque. »

Dans notre épisode, c’est un ânon bien spécifique qu’ils doivent emprunter car « aucun homme ne s’est jamais assis dessus » (v. 30). Ce n’est pas un simple détail en passant car d’après la loi juive, un objet ou un animal ne pouvait servir à un usage sacré que s’il n’avait jamais servi à un usage profane. Le bien devait être neuf, jamais utilisé (voir Nombres 19.2 ; Deutéronome 21.3). Et c’est le cas de cet ânon qui peut donc servir à l’usage sacré de la cérémonie à laquelle nous allons assister : le roi divin va rentrer dans Jérusalem sous les acclamations.

Mais nous pouvons noter la simplicité de ces préparatifs, Jésus se sert seulement d’un élément du monde naturel, un ânon. Il n’a pas requis un char ni un carrosse, il n’a pas utilisé d’artifice, il n’est pas venu sur un char de feu suivi de légions d’anges chantant les louanges du Seigneur. Il aurait pu, mais il a utilisé la simplicité du monde naturel, et des instruments humains (deux disciples). Ces préparatifs sont très différents de ceux qui sont actuellement en cours depuis des mois pour le couronnement de Charles III en Angleterre. Jésus a choisi la simplicité et l’humilité et ça nous amène à notre 2e point.

Mais nous pouvons déjà retenir avec ces premiers versets que, si Jésus est Dieu, alors nous pouvons lui faire confiance, et nous sommes invités à la même obéissance que ses disciples qui ont pris des risques en suivant les instructions claires de Jésus.

2/ Un Roi humble (v. 35-36)

Venons-en à notre deuxième point : nous avons besoin d’un roi comme Jésus parce qu’il est un roi humble. Au v.35, les disciples amènent à Jésus l’ânon qu’il a demandé et ils disposent des vêtements en guise de selle. Il n’y a aucun apparat, aucun faste apparent. Il n’y a même pas de tapis rouge et les gens sont obligés d’étendre leurs vêtements par terre. On commémore traditionnellement cet épisode une semaine avant la fête de Pâques, lors du dimanche qu’on appelle dimanche des rameaux, parce que les évangélistes Matthieu et Marc précisent qu’en plus des vêtements, les gens de la foule « coupèrent des branches d'arbres, et en jonchèrent la route » (Matthieu 21.8, voir aussi Marc 11.8). Ceux qui acclament Jésus sont des gens du peuple, ce ne sont pas des notables, et leur seule marque de respect c’est d’étendre des vêtements sur la route et ils suivent ainsi une coutume qui était réservée aux personnages royaux (voir 2 Rois 9.13). Ce geste de la foule montre que ces gens reconnaissaient que Jésus était le roi des Juifs qu’il prétendait être. Et ils avaient peut-être à l’esprit la prophétie de Zacharie 9.9 que Jésus était en train d’accomplir mot pour mot :

« Sois transportée d'allégresse, fille de Sion ! Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! Voici, ton roi vient à toi. Il est juste et victorieux, il est humble et monté sur un âne, sur un âne, le petit d'une ânesse. »

Nous l’avons vu, Jésus était à Béthanie, il était donc à environ quatre kilomètres de Jérusalem, sur le versant est de la montagne des Oliviers. Il était tout proche. Il n’avait pas besoin d’un ânon parce qu’il était fatigué et qu’il n’avait pas la force d’accomplir cette distance, mais il avait besoin d’un ânon pour accomplir cette prophétie. Il avait besoin d’un ânon pour manifester qu’il était bien le roi-messie, mais qu’il était un roi humble. Voilà notre cortège royal : un petit âne qui marche sur des vêtements et des branches d’arbres.

Dans quelques semaines, le 6 mai 2023, certains d’entre vous seront peut-être devant leur poste de télévision pour assister au sacre du roi Charles III. Croyez-moi, il ne viendra pas sur un ânon. Vous verrez plutôt le faste, l’apparat, le luxe d’une cérémonie millimétrée, à laquelle assisteront 2000 invités triés sur le volet. Les puissants de ce monde seront rassemblés dans l’abbaye de Westminster.

Alors je vous invite à un petit exercice, quand vous regarderez le sacre de Charles III : pensez à Jésus. Regardez et contemplez le contraste qui existe entre l’entrée à Jérusalem de Jésus sur un ânon emprunté, et celle de Charles III dans un carrosse doré tiré par un attelage de huit chevaux pour un coût de cérémonie supérieur à 100 millions d’euros. En contemplant ce contraste, soyez émerveillés par le roi-serviteur qu’est Jésus, ce roi humble alors qu’il s’apprêtait à accomplir en tant que roi-messie la mission la plus importante, la plus décisive de toute l’histoire de l’humanité. Contemplez le roi-serviteur et soyez émerveillés. Je cite Jean Calvin qui dit :

« Dieu a mieux fait triompher son fils sous ce pauvre équipage que s'il eût eut les ornements de tous les rois du monde. »

Pourquoi tant de simplicité et d’humilité alors qu’il aurait pu prétendre à plus de faste que Charles III ? C’est parce que le royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper les regards (Luc 17.20) car il s’adresse aux humbles de ce monde. Jésus est venu donner sa vie pour ceux qui reconnaissent leur indignité, pour ceux qui reconnaissent qu’ils sont éloignés de Dieu par leur péché, et qu’ils ont besoin de lui pour leur salut. Et ça tombe bien, car Jésus est justement aussi un roi-rédempteur, et c’est ce que nous allons voir dans la troisième partie (v. 37-40)

3/ Un Roi Rédempteur (v. 37-40)

Jésus arrive à Jérusalem avec ce cortège si singulier qui reconnait en lui un roi (v. 38), mais qui reconnait aussi en lui le messie attendu, celui qui devait ramener la paix dans le ciel, ou plutôt la paix avec le ciel. Avant même qu’il rentre dans la ville sainte, les cris de joie de la foule retentissent et elle loue Dieu à haute voix (v. 37). Vous vous souvenez de Zacharie 9 ? Jérusalem pousse bel et bien des cris de joie et est transportée d’allégresse en présence de ce roi victorieux qui s’avance sur un âne.

De manière très explicite, la foule reconnait que Jésus est le messie, qu’il est un roi-rédempteur. En disant « Béni soit le roi qui vient au nom du Seigneur » (v. 38), la foule cite le Psaume 118. Dans ce psaume, le psalmiste s’exclame « Ô Eternel, accorde le salut » (v. 25) et ajoute « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! » (v. 26). Cette phrase reprise par la foule est une référence claire au messie qui devait venir dans le monde comme un médiateur envoyé par Dieu. Il devait venir au nom du Seigneur pour rétablir la paix et assurer le salut. Dans l’évangile de Matthieu, la foule l’appelle Fils de David qui est un titre messianique, et elle s’exclame Hosanna (Matthieu 21.9) qui signifie « sauve donc ». Luc n’a pas retranscrit ce terme Hosanna car le destinataire initial de cet évangile est un païen qui n’aurait probablement pas compris ce terme hébreu. Mais l’idée est quand même là. Jésus est venu pour accomplir le salut et même si la foule n’était pas capable d’exprimer à ce moment-là de quelle manière Jésus allait accomplir le salut, les miracles qu’il avait accomplis tout au long de ce ministère étaient suffisants pour affirmer que Jésus était l’envoyé de Dieu (v. 37), le messie, le médiateur d’une nouvelle alliance. Et d’après le récit de Jean, le miracle de la résurrection de Lazare de Béthanie avait la première place dans l’admiration reconnaissante de la multitude des disciples (voir Jean 12.17-18).

Les œuvres de Jésus rendent témoignage que le Père l’a envoyé comme médiateur, mais l’œuvre la plus extraordinaire qu’il va accomplir six jours plus tard (et le peuple ne le sait pas encore), c’est sa mort à la croix. Ce moment historique où Jésus va porter sur ses épaules le poids de nos fautes pour en expier la condamnation. C’est en mourant sur la croix que Jésus a accompli notre rédemption, qu’il a payé pour notre rachat. Et c’est à cette occasion qu’il va recevoir sa couronne, une couronne d’épines (Matthieu 27.29) qui est venue encore plus blesser son corps déjà meurtri par les coups et par les clous. Voilà l’issue de ce cortège royal et de cette cérémonie de couronnement : une mort sur une croix affublé d’une couronne d’épines. Quelle ironie !

Le couronnement de Jésus n’a rien à voir avec les couronnements que j’ai cités en introduction. Et là encore, le 6 mai, je vous invite à contempler le constate avec la couronne en or massif, garnie de rubis et de saphirs et pesant plus de deux kilogrammes dont sera revêtu le roi Charles III. Le roi dont nous avons tous besoin (même les français !), c’est un serviteur souffrant qui offre sa vie en sacrifice pour notre rédemption.

Jésus est ce roi des rois, mais il n’est pas venu conquérir un royaume terrestre et ses richesses éphémères. S’il était venu comme un roi conquérant, il serait venu à cheval, mais l’âne qu’il a choisi est l’animal d’un homme de paix d’après la prophétie de Zacharie. Le royaume qu’il est venu inaugurer n’est pas de ce monde (voir Jean 18.36) et la paix qu’il est venu apporter n’est pas une paix terrestre, mais une paix qui se situe dans la sphère céleste, une réconciliation devenue possible avec le créateur du ciel et de la terre et qui habite une lumière inaccessible. « Paix dans le ciel et gloire dans les lieux très hauts » grâce au sacrifice de Jésus. La victoire que Jésus a acquise en mourant à la croix est bien supérieure à toutes les conquêtes militaires que vous pouvez imaginer, car Jésus a triomphé de la malédiction du péché et de la mort.

Oui, Jésus est digne de notre louange, de notre adoration, de notre reconnaissance. Oui, nous pouvons pousser des cris de joie en contemplant l’œuvre qu’il a accomplie.

Au verset 39, la réaction des pharisiens aux cris de louange des disciples illustre la division qui existait au sein du peuple d’Israël entre ceux qui reconnaissaient Jésus comme le messie, et ceux qui ne voulaient pas se résoudre à accepter sa seigneurerie. En affirmant aux Pharisiens que les pierres crieraient à la place des disciples s’ils se taisaient, il leur fait comprendre que les propos de la foule sont légitimes et qu’il accepte ce titre de messie et de roi. Et il les avertit également que leur cœur est plus dur que la pierre et que leur intelligence et leur discernement sont plus obscurcis que ceux d’un objet inanimé. Et en considérant l’incrédulité et le rejet des élites de son peuple, Jésus se met à pleurer ce qui nous montre qu’il est un roi compatissant.

4/ Un roi compatissant (v. 41-42)

Les versets 41 et 42 nous montrent la compassion de ce roi. Alors que Jésus approche de Jérusalem et qu’il voit certainement la ville devant lui, il ne peut retenir ses larmes. Quel contraste entre la joie d’une partie du peuple et les larmes de Jésus ! Mais Jésus connaît la suite de l’histoire et l’altercation qu’il vient de vivre avec les Pharisiens a réveillé en lui la connaissance qu’il a de la résistance et du rejet qu’il allait vivre au terme de cette dernière semaine de ministère. Cette même foule qui l’acclamait en cet instant, allait aussi l’abandonner et, pour certains, demander sa mort (Luc 23.21). Quelle ironie encore une fois ! Jésus connaissait le cœur des hommes, il avait conscience que les acclamations étaient certes sincères mais aussi bien superficielles. Nous l’avons dit : Jésus est Dieu, il est omniscient et il connait toutes choses ; mais il aussi pleinement humain, et en pleurant de cette manière, il nous révèle en même temps la profondeur de son humanité. Il ne peut contenir sa douleur et ses émotions. Nous voyons sa tristesse mais aussi son amour immense pour les brebis perdues qu’il était venu sauver. Ses larmes nous parlent peut-être mieux encore que ses paroles.

Ça doit être une source d’inspiration pour nous. On devrait pleurer comme Jésus en voyant les gens se perdre autour de nous. C'est une preuve d'amour envers notre prochain que de s'inquiéter de sa destinée éternelle.

C’est tellement triste et même presque révoltant de voir quelqu’un passer à côté d’une bonne décision par ignorance, ou d’une bonne occasion par négligence. Pardon de le dire comme ça mais quelqu’un qui néglige la main tendue de Dieu et le salut en Jésus Christ est aussi stupide que quelqu’un qui est allé aux toilettes juste au moment où le peloton du Tour de France passait devant le camping-car qu’il avait garé sur le bord de la route depuis 10 jours en attendant ce moment. C’est trop bête.

J’ai pris un exemple un peu trivial mais quand il est question du salut et d’une destinée éternelle, ce n’est pas à prendre à la légère. On comprend que Jésus se lamente : « Oh, si toi qui est le peuple de Dieu, si toi qui es la ville sainte, le sanctuaire de Dieu, si tu ouvrais les yeux au moins en ce jour ! Jusqu’à maintenant, tu as été outrageusement rebelle à Dieu, mais il est encore temps maintenant de te repentir, ne laisse pas passer cette ultime occasion ! »

Voilà comment s’exprime la compassion de Jésus, mais ça ne l’empêche pas d’adresser des reproches. C’est par une ignorance coupable que le peuple juif va rejeter son Sauveur. Ephésiens 4.18 : « Ils ont l'intelligence obscurcie, ils sont étrangers à la vie de Dieu, à cause de l'ignorance qui est en eux, à cause de l'endurcissement de leur cœur ». L’ignorance et la cécité spirituelle ne sont pas des excuses et ceux qui négligent la grâce de Dieu méritent une juste punition et c’est ce que Jésus nous montre avec les deux versets qui suivent.

5/ Un Roi qui juge (v. 43-44)

Aux versets 43 et 44, nous voyons que Jésus est un roi qui prononce un jugement sur la ville rebelle, un roi qui juge ce peuple qui le rejette. Jésus prophétise la ruine de Jérusalem et sa destruction par les troupes conduites par Titus qui aura lieu 40 ans plus tard, en l’an 70. L’armée romaine a effectivement encerclé Jérusalem et construit des retranchements. C’est le terme utilisé au v. 43 et qui peut aussi bien désigner des tranchées que des palissades. L’historien Flavius Josèphe raconte que les Romains ont élevé un tel retranchement autour de Jérusalem, d’abord en bois, puis ensuite en pierre, quand le premier a été brûlé par les Juifs. Le siège de Jérusalem, qui a duré plusieurs mois, a conduit à la destruction totale de la ville de Jérusalem, que ce soient les maisons, les habitants et même le temple qui n’a jamais été reconstruit depuis. Cette prophétie que Jésus a réitérée plusieurs fois (Luc 21.6) et qui avait déjà été annoncée par d’autres prophètes avant lui (voir Michée 3.12) s’est accomplie mot pour mot.

Comme les prophètes qui l’ont précédé, Jésus avait le souci du salut des hommes mais aussi celui d’annoncer le jugement de Dieu. La raison de cette destruction nous est donnée sans ambiguïté à la fin du verset 44 :« parce que tu n’as pas connu le temps où tu as été visitée ». La destruction de Jérusalem était un acte de jugement divin parce que ses habitants (au moins les autorités et un certain nombre d’entre eux) avaient refusé de reconnaître et d'accepter leur messie lorsqu'il était au milieu d'eux. Ils sont punis pour leur incrédulité. Jean l’a exprimé ainsi dans le prologue de son évangile en désignant Jésus comme la Parole incarnée ; il dit :

« Elle était dans le monde, et le monde a été fait par elle, et le monde ne l'a point connue. Elle est venue chez les siens, et les siens ne l'ont point reçue. » (Jean 1.10-11)

Quel drame ! La venue de Dieu en Jésus devait être un signe de paix mais elle est devenue un signe de jugement. Et, dans sa souveraineté, Dieu se sert parfois de nations païennes pour accomplir ses jugements. C’est ce qu’il avait déjà fait avec les Babyloniens de Nebucadnestar au début du VIe siècle avant J.C. et c’est ce qu’il a fait à nouveau avec les armées de Titus.

Nous n’aimons pas vraiment l’idée d’un jugement de Dieu car cela heurte notre sensibilité, mais nous devrions être rassurés de savoir qu’à la fin des temps la justice sera rendue par ce Dieu omniscient qui est justice. La justice est un attribut de Dieu qui se manifeste autant dans son jugement que dans le salut qu’il offre. Le jugement manifeste son caractère saint et juste car il réserve un châtiment aux méchants, à ceux qui rejettent sa miséricorde. Et ce peuple qui a refusé la paix, et le prince de la paix verra revenir Jésus cette fois pour le jugement. Mais la justice de Dieu se manifeste aussi dans sa volonté de sauver gracieusement son peuple, à qui il a promis le salut. Le peuple reçoit cette justice et peut se l’approprier grâce à Christ, qui est mort et ressuscité en raison de nos fautes et qui a satisfait les exigences de justice de Dieu à notre place.

Cette annonce du jugement est un avertissement pour nous et pour tous ceux qui résistent à son amour, à sa miséricorde et à sa grâce.

6/ Un Roi qui purifie (v. 45-46)

Dans la suite du récit (probablement le lendemain, d’après le récit de Marc 11.11-17), Jésus se présente comme un roi qui purifie. Il se présente comme un souverain qui a autorité, en tant que Fils, sur la maison de son Père. Cette maison, c’est le temple de Jérusalem, où était invoqué le nom de l’Eternel, ce lieu qui devait être « une maison de prière pour tous les peuples » d’après la prophétie d’Esaïe 56.7, mais qui était devenu « une caverne de voleurs » d’après la prophétie de Jérémie 7.11, que Jésus cite également au verset 46.

En tant que prophète envoyé par Dieu, il entreprend de purifier ce qui devait être le centre de la piété du peuple d’Israël, où les sacrificateurs et les prêtres (les lévites) avaient pour mission de servir d’intermédiaires entre les hommes et Dieu en réalisant des sacrifices pour expier les péchés et en intercédant auprès de Dieu au nom du peuple. Et les animaux qui se vendaient dans l’enceinte du temple servaient à cet office. Mais il n’y avait pas lieu de réaliser ce commerce dans le temple et de s’enrichir à cette occasion, car il est évident que, si Jésus agit de la sorte, c’est parce que les marchands et les changeurs de monnaies exigeaient des sommes exorbitantes de sorte que le marché du temple avait pris l'allure d'un repaire de voleurs. Jésus fait la police du temple (voir Marc 11.15-16) à la place des autorités défaillantes et complices. Et je pense qu’on peut y voir au passage une mise en garde encore actuelle envers ceux qui cherchent à s’enrichir sur le dos de la piété. Il suffit de surfer un peu sur internet pour en trouver malheureusement beaucoup, des prophètes de la prospérité qui cherchent leur propre enrichissement par exemple.

Jésus est chez lui dans la maison de son Père et il veut purifier l’office du temple pour réveiller les Juifs et les rendre plus attentifs à ce qui est en train d’arriver lors de cette semaine décisive. Tout ce commerce et cette agitation détournent le peuple et le temple de leur vocation. Cette purification annonce le règne du messie dans son temple tel que décrit par Malachie 3.1-3 :

« Et soudain entrera dans son temple le Seigneur que vous cherchez ; Et le messager de l'alliance que vous désirez, voici, il vient, dit l'Éternel des armées. […] Il purifiera les fils de Lévi. »

Jésus avait déjà agi de la sorte au début de son ministère (en Jean 2.13-17) et il avait rencontré de l’opposition. Au terme de son ministère public, il reproduit la démarche et le renouvellement de cet acte annonce le jugement qui ne tardera pas à frapper le sacerdoce infidèle à sa mission, et avec lui le peuple tout entier. En agissant ainsi, Jésus montre qu’il est le roi-messie, qu’il a l'autorité pour purifier le temple et qu’il est aussi un souverain sacrificateur. Comme le dira Hébreux 9.11-12 :

« Christ est venu comme souverain sacrificateur des biens à venir. Il a traversé le tabernacle plus grand et plus parfait, qui n'est pas construit de main d'homme, c'est-à-dire, qui n'est pas de cette création. Et il est entré une fois pour toutes dans le lieu très saint, non avec le sang des boucs et des veaux, mais avec son propre sang, ayant obtenu une rédemption éternelle. »

Par sa mort et sa résurrection, Jésus a assuré le rachat de ceux qui se confient en lui pour leur salut, mais il désire aussi les purifier jour après jour.

Jésus est comme un conducteur de bateau en perdition. Il a redressé la barre pour conduire son équipage à bon port et il continue à tenir la barre pour ceux qui sont dans son bateau, pour qu’ils aillent dans la bonne direction. Jésus-Christ continue son œuvre de purification jour après jour, il cherche à faire disparaître les impuretés avec l’aide du Saint-Esprit qui habite en nous pour nous rendre davantage conformes à l’image parfaite du Christ. C’est tout au long de la marche chrétienne que Dieu accomplit cette œuvre que l’on appelle la sanctification ; et c’est parfois douloureux, mais il est souvent nécessaire pour un arbre ou pour une vigne d’être taillé, et c’est souvent ce processus qui permet de produire du fruit, de produire plus de fruits.

7/ Un Roi qui interpelle (v. 47-48)

À l’issue de cette séquence, Jésus a dispensé un enseignement public dans le temple et c’est ce qu’il a fait tous les jours lors de cette ultime semaine avant sa crucifixion : « Il enseignait tous les jours dans le temple » (v. 47). On est, dans notre septième partie, face à ce roi qui interpelle et dont le discours ne laisse personne indifférent.

Deux groupes se distinguent : les autorités religieuses et les notables d’un côté, les gens du peuple de l’autre. Les premiers sont hostiles et cherchent à le faire périr (v.47), les autres l’écoutent avec admiration (v.48). La haine féroce des autorités est une application directe de la parabole des 10 mines qui a précédé le passage que nous avons lu aujourd’hui (Luc 19.11-27). Jésus avait raconté l’histoire d’un homme de haute naissance qui était allé dans un pays lointain pour se faire investir de l’autorité royale, et qui confie une mine à dix de ses serviteurs pour qu’ils la fassent fructifier. Je ne rentre pas dans les détails et dans l’interprétation de cette parabole, mais au milieu de cette parabole Jésus dit (Luc 19.14) « Mais ses concitoyens le haïssaient, et ils envoyèrent une ambassade après lui, pour dire : Nous ne voulons pas que cet homme règne sur nous ». Et c’est exactement ce qui est train de se passer. Les principaux sacrificateurs, les scribes, et les principaux du peuple, ne veulent pas que Jésus règne sur eux. Ils ne veulent pas de ce roi-là.

En 2011, j’ai vécu une expérience très intéressante alors que j’effectuais un stage à Montréal. Le Prince William et son épouse Kate sont venus en visite officielle au Canada juste après leur mariage. L’une des visites consistait à se rendre dans un hôpital pour enfants et la curiosité m’a poussé à me rendre devant cet hôpital. Je ne m’attendais pas du tout au spectacle auquel j’ai assisté. Il y avait d’un côté un groupe de fans qui hurlaient à tue-tête « Will and Kate ! », mais il y avait aussi un groupe de québécois revanchards et hostiles à la couronne britannique qui manifestaient leur opposition. Juché sur une poubelle j’ai assisté pendant près de deux heures à des échanges houleux entre les différents groupes. Je n’ai pas beaucoup vu le couple princier, car leur voiture a essuyé des jets d’œufs et de tomates, et ils se sont donc engouffrés rapidement dans le hall de l’hôpital après leur arrivée. Manifestement, certains québécois ne veulent pas de l’autorité royale britannique.

Jésus non plus ne faisait pas l’unanimité et, encore aujourd’hui, soit on est avec lui, soit on est contre lui. La position neutre, sur la poubelle, n’existe pas face au message de la croix qui doit tous nous interpeller. Car soit on décide d’accepter cette grâce qui nous est offerte en Jésus-Christ, soit on ne l’accepte pas, mais dans ce cas nous restons sous le coup de la justice de Dieu et de sa colère qui se manifeste contre le péché qui est une offense à sa sainteté. Alors si vous entendez aujourd’hui sa voix, si vous entendez cet appel, n’endurcirez pas votre cœur, mais venez plutôt au pied de la croix pour obtenir miséricorde. Et si vous voulez en savoir plus sur le message de la Bible et de l’Evangile, venez me voir, venez voir Alex ou contactez-nous via l’adresse de contact sur le site internet. On sera très heureux de vous proposer un parcours découverte de la Bible pour vous permettre de découvrir le message de la Bible, découvrir ce Jésus qui a donné sa vie pour vous. Faites-le au moins une fois dans votre vie pour vous permettre de réaliser un choix éclairé.

Après la mort et la résurrection de Jésus, les disciples ont repris le flambeau, et c’est depuis le temple de Jérusalem (Actes des Apôtres chapitre 3 par exemple) que l'enseignement de l'évangile a commencé à rayonner dans le monde entier par l’intermédiaire des apôtres. Ils ont été les témoins oculaires des événements que nous avons commentés ce matin et ils ont annoncé cette bonne nouvelle pour que toutes les nations sachent que Jésus est le roi dont nous avons tous besoin.

Un dernier mot pour conclure. L’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem a inauguré son règne, et cette procession royale s’est conclue par sa mort sur la croix et par le couronnement d’une couronne d’épine. Mais lors de sa seconde venue, quand il viendra juger la terre et établir pleinement et durablement son règne et son royaume, nous assisterons à un tout autre couronnement. Cette fois, ce couronnement sera visible de tous. Jésus ne ressemblera plus au serviteur souffrant et au roi crucifié qu’il a été, il sera resplendissant, il sera triomphant (l’Apocalypse nous parle d’une couronne d’or en Apocalypse 14.14), sa victoire sera éclatante et son règne n’aura pas de fin et c’est en sa présence que nous vivrons pour l’éternité, auprès de celui qui est notre berger, le gardien de nos âmes et notre rédempteur pour les siècles des siècles. Amen.

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